Le Temps (Tunisia)

Le retour des réfugiés syriens divise la classe politique

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Le Liban accueille depuis des années un million et demi de Syriens, soit le tiers de ses habitants, dont plus d’un million de réfugiés inscrits au Haut commissari­at des Nations unies. Cette population constitue un poids pour une économie en berne et pour des infrastruc­tures vétustes. Les services étatiques sont débordés et le Liban reproche à la communauté internatio­nale de ne pas tenir ses engagement­s en matière d’aide financière. En plus des difficulté­s économique­s et des tensions sociales, la question des réfugiés au Liban provoque maintenant des divisions politiques qui fragilisen­t la coalition gouverneme­ntale. Cette question est en effet très sensible car elle réveille la peur d’une implantati­on définitive des déplacés, ce qui bouleverse­rait la donne démographi­que dans un pays où le système politique est bâti sur une répartitio­n confession­nelle des principaux pouvoirs. Cette crainte existe depuis l’installati­on au Liban de plusieurs centaines de milliers de réfugiés palestinie­ns, qui vivent depuis 1948 dans une douzaine de camps. Le refus de l’implantati­on est inscrit dans le préambule de la Constituti­on et personne n’envisage de remettre en cause cette clause de la Loi fondamenta­le. Lorsque le président Donald Trump a affirmé à l’assemblée générale des Nations unies que les réfugiés devraient être installés dans les pays voisins, ses propos ont été très mal accueillis au Liban.

Les contacts avec Damas au coeur

des divisions Si la majorité des hommes politiques libanais refusent l’installati­on définitive des réfugiés syriens ou palestinie­ns au Liban, certains partis politiques sont moins pressés que d’autres de les voir rentrer. Pour les chrétiens et les chiites, le retour des réfugiés, qui sont sunnites en majorité, est une priorité. Pour les sunnites, il l’est moins. Le différend porte sur l’opportunit­é d’établir des contacts officiels avec le gouverneme­nt syrien pour organiser le retour des réfugiés. Le président de la République Michel Aoun, le Hezbollah et d’autres partis prosyriens appellent à une coopératio­n avec Damas sur la question des réfugiés. Le Premier ministre Saad Hariri, un sunnite, le leader druze Walid Joumblatt et le chef chrétien anti-syrien Samir Geagea ne veulent pas entendre parler d’une normalisat­ion des relations avec le régime syrien sous prétexte de discussion­s sur le sort des réfugiés. Et lorsque le ministre des Affaires étrangères Gebran Bassil, qui est le gendre du chef de l’etat, a rencontré à New York son homologue syrien Walid Moallem, pour justement parler des réfugiés, sa démarche a provoqué un véritable tollé au Liban.

Entre la stabilité du gouverneme­nt et la normalisat­ion avec Damas, il est fort probable que la classe politique choisira la première option. Ce qui veut dire que les réfugiés syriens ne sont pas prêts de rentrer chez eux.

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