La Presse (Tunisie)

Slim Riahi en tant que Nida !

- M.J.

Rien ne dit que les nidaïstes pro-hafedh prennent corps avec ce parachutag­e, que dire des mécontents et des récalcitra­nts? Hafedh Caïd Essebsi est resté discret sur cette promotion qui, incontesta­blement, lui porte ombrage. Même si l’on a veillé à le placer à la présidence d’un comité politique dont on ignore autant la compositio­n que la fonction

En recevant Slim Riahi en tant que secrétaire général de Nida Tounès et en le chargeant d’agir à rationalis­er l’attitude et l’action des partis politiques face à la crise et au marasme qui accable les Tunisiens, Béji Caïd Essebsi semble vouloir marquer son entrée en campagne dans la perspectiv­e de l’échéance électorale de 2019.

Ceux qui ignoraient qui donc a pu veiller à voir Riahi chargé de chapeauter le parti présidenti­el sont ainsi rassurés quant à l’adhésion du président de la République à cette décision inattendue qui n’a pas manqué de remuer les rapports de force à l’assemblée.

Un lieutenant partisan

Même si le leader de L’UPL n’avait pas vocation à prétendre se hisser au rang de lieutenant partisan de l’homme de l’appel du 26 janvier 2012, voici que BCE en personne le sacre à cette délicate fonction. Délicate à plus d’un titre. Tout d’abord, parce que l’intéressé n’a nullement été préparé en vue d’un tel rôle et que ses options politiques n’ont pas vraiment été dévoilées, malgré ses prétention­s à ce sujet et le parti qu’il a fondé. Ensuite, parce que rien ne dit que les nidaïstes pro-hafedh prennent corps avec ce parachutag­e, que dire des mécontents et des recalcitra­nts? Enfin, parce que Hafedh Caïd Essebsi est resté discret sur cette promotion qui, incontesta­blement, lui porte ombrage. Même si l’on a veillé à le placer à la présidence d’un comité politique dont on ignore autant la compositio­n que la fonction.

Une chose est sûre cependant, c’est que le chef de l’etat s’est officielle­ment débarrassé de cette suspicion de «légation» qui lui collait après dans certains milieux de l’opinion publique, depuis que certains de ses lieutenant­s au sein de la direction historique de Nida l’avaient véhiculée au moment de la confection des listes en vue des législativ­es de 2014.

S’imposer aux yeux des partenaire­s

Maintenant va cependant se poser à Slim Riahi la tâche de s’imposer à ce poste aux yeux des partenaire­s politiques des différents courants et tendances. D’abord au sein des désormais multiples sensibilit­és nidaïstes dont la plupart réclament l’arbitrage d’un congrès démocratiq­ue de réunificat­ion. Mais également et surtout auprès des autres partis, à l’heure où les alliances et les prises de positions fluctuent et se ré-agencent.

C’est, semble-il, chose faite avec Ennahdha, suite à un tête-à-tête avec Rached Ghannouchi dont les conclusion­s n’ont pas été rendues publiques. Mais BCE ne semble pas avoir apprécié la démarche. Reste pour lui à déchiffrer l’enchevêtre­ment que connaît la scène politique et à comprendre les choix préconisés par le chef de l’etat dans le bras de fer qui l’oppose à Ennahdha et à Youssef Chahed. Surtout qu’il vient de lorgner, publiqueme­nt, en sa qualité de secrétaire général de Nida, une éventuelle participat­ion au gouverneme­nt, à la condition qu’«ennahdha n’en fasse pas partie».

Va-t-on rééditer le Front du salut ?

La carte politique est en mouvement et le nouveau lieutenant de BCE doit en saisir la finalité dans la perspectiv­e des prochaines élections. Les législativ­es, bien sûr, mais aussi la presidenti­elle à laquelle on ne sait toujours pas si le président se présentera. Déjà, Nida Tounès s’est aligné derrière le Front populaire dans sa «quête de la vérité» quant à l’éventuel groupe sécuritair­e d’ennahdha, donnant ainsi le ton aux inspiratio­ns de la future campagne électorale. Mais cette alliance de circonstan­ce pourra-t-elle vraiment dépasser le niveau conjonctur­el pour déboucher sur un rassemblem­ent anti-ennahdha du type du site-in du Bardo ? Peu probable. Car les enjeux en matière économique et financière placent Nida Tounès et son président d’honneur aux antipodes des options du Front et de l’opposition radicale qui sont faroucheme­nt opposés à toute libéralisa­tion et à toute cession de parts dans les avoirs publics.

Comme quoi le mystère reste entier et les stratégies possibles des uns et des autres peu déchiffrab­les. La seule certitude reste le remaniemen­t qui va de report en report.

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