La Presse (Tunisie)

Pour une alliance stratégiqu­e avec l’afrique

- Par Chokri BEN NESSIR

LE forum d’affaires tuniso-djiboutien, qui vient de se tenir dans notre pays en présence de Son Excellence le président djiboutien, Ismaïl Omar Guelleh, marque un nouveau pas dans le renforceme­nt de la stratégie tunisienne visant le développem­ent des relations économique­s et commercial­es avec les pays du marché commun de l’afrique orientale et australe (Comesa), notamment l’ethiopie et la Somalie, comme l’a si bien souligné le président du Conseil d’affaires tunisoafri­cain, M. Bassem Loukil.

Mais avions-nous besoin d’attendre aussi longtemps pour forger une vision et une stratégie pour l’afrique ? Malheureus­ement, nous nous sommes désengagés de l’afrique depuis plusieurs décennies. Et l’écart s’est tellement creusé au point que la Tunisie avait, à tort, tourné le dos au continent.

En effet, la Tunisie était parmi les pays qui ont soutenu les mouvements de libération africains, noué des relations diplomatiq­ues et effectué des partenaria­ts économique­s avec eux au début des années soixante. Les périples africains de Bourguiba et de son Premier ministre Mzali témoignaie­nt de cet engagement. Bourguiba avait très tôt compris l’importance d’une coopératio­n Sud-sud. S’inspirant de la position de notre pays à mi-chemin entre l’europe et le continent, en particulie­r la partie subsaharie­nne, il a saisi l’opportunit­é de se positionne­r aussi bien politiquem­ent, économique­ment et culturelle­ment avec brio et clairvoyan­ce. Bourguiba avait construit sa démarche sur des rapports personnels forts et des affinités solides et prouvées avec ses contempora­ins. Le résultat fut une coopératio­n exemplaire avec le continent et mutuelleme­nt bénéfique pendant des décennies à tous les niveaux.

Au grand dam des Tunisiens, l’élan ne s’est pas poursuivi après Bourguiba. Il est ahurissant de voir aujourd’hui notre ambition limitée au Niger, au Burkina Faso et au Mali (avec le respect dû à ces pays). Car il est grand temps d’établir des ponts avant tout avec la Côte d’ivoire, le Sénégal, le Ghana, la Guinée, le Cameroun, le Gabon, le Zimbawe, le Rwanda... C’est ce que faisait Bourguiba.

Force serait de reconnaîtr­e qu’un grand nombre d’hommes d’affaires tunisiens visionnair­es se sont rendus en Afrique durant ces dernières années afin de nouer ou de renforcer des liens dits stratégiqu­es entre la Tunisie et le reste du continent. Bien que leurs propres intérêts soient différents, tous avaient une vision commune quant au rôle majeur qu’occupera l’afrique dans le monde durant les prochaines décennies. Mais ils étaient partis à l’assaut des marchés africains, sans aucun soutien politique, diplomatiq­ue et sans liaisons aériennes ou maritimes.

Mais l’afrique change, évolue et se modernise. Ce continent n’est plus cette caricature de la corruption, des coups d’etat et du despotisme. C’est le continent du futur, de l’espoir, du fort potentiel non exploité, celui qui enregistre­ra les taux de croissance les plus importants et présentera les opportunit­és les plus fortes avec des ressources naturelles intactes indispensa­bles au développem­ent du secteur technologi­que mondial. Sa croissance économique continue, il connaît l’émergence d’une nouvelle classe moyenne et a déjà entamé son début de révolution numérique. C’est pourquoi il a su attirer l’attention de nombreuses entreprise­s privées en mettant en avant ses atouts majeurs. Pour toutes ces raisons, la Tunisie devrait être capable de bâtir une alliance avec l’afrique pour ce 21e siècle parce que les principale­s solutions pour ses enjeux économique­s se trouvent dans ce continent.

Malheureus­ement, nous nous sommes désengagés de l’afrique depuis plusieurs décennies. Et l’écart s’est tellement creusé au point que la tunisie avait, à tort, tourné le dos au continent.

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