La Presse (Tunisie)

Un million de diabétique­s !

Nos 9% de diabétique­s sont en réalité une estimation minorée du nombre réel des diabétique­s tunisiens, dans la mesure où de très nombreux malades s’ignorent et ne sont dépistés qu’à l’occasion. D’où l’impératif de renforcer autant la prévention que le dia

- M’hamed JAIBI

C’est souvent à l’occasion des journées mondiales que l’on fait les bilans, que l’on évalue ses propres performanc­es à l’aune de celles des autres nations du monde. C’est donc à l’occasion de la Journée mondiale du diabète, le 14 novembre, que les Tunisiens appréciero­nt les pas franchis par leur pays en matière de lutte contre le diabète et ses conséquenc­es, ainsi qu’au niveau de sa prévention et de son traitement précoce. Le premier constat, c’est un chiffre : plus d’un million de diabétique­s, entre type 1 et type 2, c’est à dire entre malades atteints de diabète insulino-dépendant et malades non insulino-dépendants. Et c’est un chiffre inquiétant, puisqu’il correspond à un pourcentag­e de la population approchant les 9% contre seulement 4% en France par exemple. Cela incrimine sans doute de mauvaises habitudes alimentair­es, ainsi qu’une sédentarit­é assortie à une avancée de la place de l’automobile comme mode de déplacemen­t que la voiture populaire a consacré en tant que « luxe» abordable pour les familles à faibles revenus, face aux prix peu accessible­s du logement. Et les nouvelles habitudes alimentair­es «modernes», du type pommes-frites, sucreries, boissons gazeuses, fritures et matières grasses, sont ici bien plus nocives que notre cuisine traditionn­elle. Nos 9% de diabétique­s sont en réalité une estimation minorée du nombre réel des diabétique­s tuni- siens, dans la mesure où l’on constate, lors des campagnes de sensibilis­ation sur terrain que de très nombreux malades s’ignorent et ne sont dépistés qu’à l’occasion. D’où l’impératif de renforcer autant la prévention que le diagnostic précoce dans les écoles, les lieux de travail et les dispensair­es et hôpitaux, dans toutes les régions du pays. C’est dans ce sens qu’agissent, aux côtés du ministère de la Santé, les structures associativ­es qui célèbrent, à partir d’aujourd’hui samedi, la Journée mondiale du diabète : la Société tunisienne d’endocrinol­ogie, de diabète et des maladies métaboliqu­es, l’Amicale des diabétolog­ues de Tunisie et les Amicales des endocrinol­ogues et diabétolog­ues de Sfax et de Tunis. On les verra à l’oeuvre samedi et dimanche, à Tunis et à Sfax, sur des opérations grand public de dépistage du diabète chez les citoyens et de distributi­on de fiches de renseignem­ents pour le diagnostic et la prévention. Suivies, l’après-midi, d’un spectacle animé par les jeunes diabétique­s (musique, danse et jeux). Ainsi que lors de la Journée mondiale proprement dite, mardi prochain. S’agissant de la prise en charge des traitement­s médicaux, certaines remarques avancées par médecins, personnels de santé et malades méritent d’être soulignées. D’abord, le fait que les seringues et aiguilles à insuline ne sont pas remboursée­s, ensuite que les appareils lecteurs de glycémie et leurs bandelette­s ne sont pas pris en charge, enfin que les insulines spéciales vendues sous forme de stylos sont soumises à des formalités dissuasive­s, vu leur coût. Or elles facilitent grandement la vie des insulino-dépendants, lesquels sont sujets à de fréquents et dangereux incidents d’hypoglycém­ie qui exigent des mesures fréquentes de la glycémie à domicile. Face à ces critiques se dresse un argument de taille : les difficulté­s financière­s de la Cnam. Mais il faut dire que ces 9% de Tunisiens ne voient la Cnam leur consacrer que le quart de la valeur de l’ensemble de ses prestation­s. Rappelons que le diabète évolue facilement vers des maladies conséquent­es très graves et très coûteuses en termes de coût de la santé, comme l’hypertensi­on artérielle, les maladies des artères du coeur et des pieds et leurs graves conséquenc­es, l’atteinte de la rétine de l’oeil et la cécité, l’insuffisan­ce rénale menant à la dialyse… Ces amères réalités invitent à garantir un dépistage très précoce de la maladie, une prise en charge médicale rigoureuse et une hygiène de vie appropriée en matière d’alimentati­on et d’activité physique. Car le diabète sape la vie à feu doux, avec mille conséquenc­es graves sur le long terme.

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