Des portraits free style
Après un mois de congé, la galerie Roubtzoff rouvre ses portes avec une exposition intitulée «Portraits» qui représente plusieurs époques de la peinture tunisienne.
L’exposition «Portraits» se poursuit jusqu’à la fin du mois de juillet et réunit un ensemble d’ oeuvres de Hamadi Ben Saâd (2010), Adel Akermi, sacs de ciment et sculptures sur céramique (2016/17), des portraits de Brahim Dhahak et de Jalel Ben Abdallah, un tableau de la période noire de Aly Ben Salem des années 1939, lors de sa première année à Stokholm, un pastel de Ammar Farhat des années 40, des oeuvres de Zoubeida Chammari, de Hacine Msadak qui propose des oeuvres à la Modigliani, influencé également par Bouabana, il y a aussi des oeuvres de Habib Bouabana, Taher Mimita et ses trois oeuvres à la manière orientaliste, Fériel Lakhdhar… Cette exposition d’été ne présente pas de nouveauté, mais permet aux visiteurs, qui ne sont pas nombreux en cette période, de revisiter les travaux des grands maîtres de la peinture tunisienne et de redécouvrir l’univers particulier des portraits qu’ils ont réalisés à un moment ou un autre de leur carrière. Excepté l’autoportrait réaliste en sépia de Hatim El Mekki, les autres portraits sont fantasmés et servent de prétexte pour jouer avec les formes et les couleurs. Le trio de portraits de Hamadi Ben Saâd représente des personnages aux regards exorbités, ou encore des masques totémiques rappelant nos origines africaines. Une peinture charnelle qui interroge la spatialité avec toute sa complexité. L’artiste emprunte une démarche tactile sur différents supports de papier, dont le Kraft marouflé avec lequel il crée un univers imaginaire audacieux et sans convention. Deux oeuvres de grand format de Jalel Ben Abdallah, l’une des figures de proue de l’Ecole de Tunis, encore vivant, trônent au milieu de la galerie. Une très belle fresque des années 80, qui devrait, en principe, être dans un musée, et une autre oeuvre sur contreplaqué, datant de 1945, qu’il avait offerte à sa soeur à l’occasion de son mariage après la Seconde Guerre mondiale, représentent des personnages féminins évoquant les miniatures persanes. Passé maître du chromatisme, le peintre s’adonne à coeur joie à une palette aux couleurs pastel qui donne une vision de délicatesse et de raffinement. Le portrait de Brahim Dhahak (peintre et graveur 1931 – 2004) ne manque pas d’originalité et constitue un patrimoine inestimable grâce à un style inspiré de la tapisserie de Gafsa, son fief natal, et dont il a fait une source d’inspiration et de créativité. Répétition des couleurs et des gestes pour une interprétation de la vie quotidienne. Habib Bouabana (1942-2003), peintre considéré comme exceptionnel, grâce à une peinture «brouillonne et bouillonnante», qui réfléchit non pas seulement son caractère, mais aussi celui du Tunisien. Il a su reproduire à la manière de Modigliani, mais en les déformant, les portraits de certaines figures de la société tunisienne et leur donne une personnalité comme aucun peintre ne l’a encore fait. Les adeptes de ce peintre retrouveront dans cette exposition quelques-unes de ses oeuvres, dont la fameuse «Hannana» . Adel Akermi est aussi présent avec trois portraits et des sculptures en céramique. Peintre autodidacte, il a su mettre en place son propre univers en peignant sur de vieux sacs de ciment. Il propose des portraits ludiques de personnages familiers ayant bercé sa jeunesse. Il adopte le cubisme comme démarche qui lui permet une grande liberté. Les personnages sans visage se prêtent à toute interprétation. Ce sont des espaces de couleurs et de lumières réalisés avec la fraîcheur d’un peintre demeuré enfant. Le reste de l’exposition présente des oeuvres intéressantes de peintres ayant fait leurs preuves sur la scène artistique et qui attendent aussi bien que les autres les visiteurs qui, malheureusement, se font rares en cette période estivale.