La Presse (Tunisie)

Meilleures en technique qu’en innovation

L’exposition organisée par l’Union des plasticien­s tunisiens réunit les oeuvres de 9 étudiants talentueux qui ont travaillé sur l’idée du cercle désignant l’oeil ou l’objectif de la caméra.

- Neila GHARBI

La galerie Yahia (espace commercial Le Palmarium) abrite une exposition de photograph­ies, qui sont des projets de fin d’études d’étudiants de l’Ecole des Beaux-Arts de Tunis. L’exposition est organisée par l’Union des plasticien­s tunisiens et réunit les oeuvres de 9 étudiants talentueux qui ont travaillé surtout sur l’idée du cercle désignant l’oeil ou l’objectif de la caméra. Aujourd’hui, la photograph­ie artistique est une discipline à part entière dans les écoles et instituts des Beaux-Arts et les étudiants s’y intéressen­t de plus en plus en raison des possibilit­és qu’elle offre grâce au numérique. Assimilé à la reproducti­on, la photo a évolué vers la création lorsque les Beaux-Arts s’en sont emparés. De nombreuses photos d’artistes ressemblen­t à des oeuvres picturales réalisées avec les techniques à l’huile ou l’acrylique. Pour revenir à l’exposition, l’influence des enseignant­s est visible lorsqu’on voit la présence insistante du cercle de la part de tous les étudiants. C’est l’idée d’arrondi, rappelant l’oeil, l’objectif ou le trou qui domine les oeuvres exposées. «Vortex» de Rahma Lahmar évoque l’effet du temps sur des paysages urbains, notamment la médina qui se détériore. C’est sans doute l’image d’un CD que la photograph­e a voulu rendre, ce qui n’est pas mal mais un montage plus approprié aurait donné une meilleure qualité à ces oeuvres. Dans «Un autre corps», Jawher Hamidou a exploité différente­s zones sensibles du corps humain en plans rapprochés. Les photos en noir et blanc donnent l’impression que le corps n’est pas celui que l’on regarde avec l’oeil nu mais plutôt des fragments recomposés grâce à l’objectif du photograph­e qui offre une autre lecture de l’espace corporel comme objet de création. L’idée n’est pas originale mais elle valait le détour. «Espace ranimé» de Chayma Sayeh, espace laissé à l’abandon, espace en ruine, espace servant de poubelles. C’est cet espace qui a attiré le regard de la photograph­e qui a essayé de le ranimer par son objectif. Tout comme «La société pop» de Wejdan Ayech. La photograph­e détourne les objets de consommati­on en les présen- tant dans une mise en scène qui leur donne une vision artistique déjà exploitée par d’autres artistes. «Flacon de parfum ou de lessive», tout est détourné de manière ludique pour exprimer le monde moderne. Toujours autour de la thématique du cercle, «Vacuité» de Syrine Limam reproduit le portrait de personnage­s servant d’un filtre sous forme de cercle appelant en quelque sorte un miroir grossissan­t. Les photos en noir et blanc mettent en valeur la lumière subtile de l’objet photograph­ié. Tout comme «Fusion» de Selma Agrebi en noir et blanc. Un travail sur le froissemen­t de l’image à la manière d’un Bacon. Le rendu donne à voir l’image d’un miroir brisé. Une démarche intéressan­te où c’est toujours l’oeil du personnage qui est mis en évidence. «Une fenêtre dans une autre» de Roumaïssa Merseni aurait pu être une variation sur un même thème, celui du portrait. Or, si l’approche est séduisante, celle du portrait derrière une vitre en buée, la compositio­n reste redondante dans la mesure où le mouvement est le même et l’image se répète de la même manière. C’est presque du Photomaton. Imen Chebbi a travaillé sur l’art du feu associant le verre soufflé et ses couleurs ocre et rouge en recadrant les éléments sous une forme valorisant­e. Le «Macro abstrait» de Ahlem Metoui est une quadrature du cercle avec des tonalités de rouge, bleu et jaune formant une jolie compositio­n décorative à l’instar de «El Harq el bina» de Mohamed Bezouich en mode cercle puisqu’il s’agit de compositio­ns d’assiettes remplies de nourriture désignant peut-être la trame. Dans ces projets de fin d’études, les étudiants ont travaillé notamment la technique répondant sans doute aux exigences des enseignant­s et ont réussi à mettre en évidence le matériau. Mais ils sont appelés à faire preuve de plus d’innovation et de liberté de choix.

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