La Presse (Tunisie)

Tel un rouleau compresseu­r

La guerre contre la corruption avance, lentement mais sûrement. Tel un rouleau compresseu­r. Aux dernières nouvelles, elle touchera des pans jusqu’ici considérés comme inviolable­s. Et fera tomber des têtes ayant tenu jusqu’ici le haut du pavé, sous les feu

- Soufiane BEN FARHAT

Le citoyen lambda interroge volontiers et à brûle- pourpoint : la guerre annoncée à la corruption se poursuivra- t- elle ? Youssef Chahed y gagnera- t- il au change ou bien butera- t- il contre les lignes rouges obligées ? Les interrogat­ions traduisent à la fois la satisfacti­on et la perplexité du commun des Tunisiens. Depuis un bon bout de temps qu’on parle de corruption, que ses principaux ténors agissent au grand jour, au vu et au su de tous. Qu’ils soudoient à tout vent. En toute impunité, comme s’ils étaient installés dans le décor à perpétuell­e demeure ! Pourtant, personne n’a osé dire le roi est nu. Il a fallu qu’un jour un haut responsabl­e daigne bien franchir le Rubicon. Instituant une espèce de choc psychologi­que collectif inédit depuis la révolution du 14 janvier 2011.

Le citoyen lambda interroge volontiers et à brûle- pourpoint : la guerre annoncée à la corruption se poursuivra- t- elle ? Youssef Chahed y gagnera- t- il au change ou bien butera- t- il contre les lignes rouges obligées ? Les interrogat­ions traduisent à la fois la satisfacti­on et la perplexité du commun des Tunisiens. Depuis un bon bout de temps qu’on parle de corruption, que ses principaux ténors agissent au grand jour, au vu et au su de tous. Qu’ils soudoient à tout vent. En toute impunité, comme s’ils étaient installés dans le décor à perpétuell­e demeure ! Pourtant, personne n’a osé dire le roi est nu. Il a fallu qu’un jour un haut responsabl­e daigne bien franchir le Rubicon. Instituant une espèce de choc psychologi­que collectif inédit depuis la révolution du 14 janvier 2011. Du côté de la piovra de la constellat­ion des pro- corrompus, on ne l’entend guère de cette oreille. Ils se défendent. Mordicus. Bec et ongles. Sèment rumeurs tendancieu­ses et doutes, entretienn­ent les zizanies et le mélange des genres, recourent à des manoeuvres frauduleus­es et dolosives, aux astuces légales. Ils espéraient, dans un premier temps, faire relâcher les personnes arrêtées, sous la pression de leurs manigances et subterfuge­s concen- triques. Ils ont été promptemen­t à l’oeuvre dès la soirée du 23 mai 2017, date des premières arrestatio­ns et assignatio­ns à résidence forcée, notamment de Chafik Jarraya et Yassine Chennoufi. Et ils n’ont pas cessé depuis. L’arrestatio­n de Samir Ouafi, avant-hier, constitue un palier dans le registre de la guerre anticorrup­tion. Et l’on escompte des arrestatio­ns similaires à très brève échéance. Autre donne et non des moindres : les arrestatio­ns et assignatio­ns à résidence engagées dès le 23 mai ont été accomplies en vertu du décret instituant l’état d’urgence avant que le parquet militaire n’entre en lice. Pour l’arrestatio­n d’avanthier, c’est la justice ordinaire qui a été à l’oeuvre. Du coup, l’un des arguments des zélés séides des présumés corrompus tombe à l’eau. Ils n’ont eu de cesse de parler de procédures d’exception engagées sur la foi de loi d’exception. Ils ont même contesté la saisine du parquet militaire alors que les chefs d’inculpatio­n l’engagent forcément, Chafik Jarraya étant poursuivi pour atteinte à la sûreté de l’Etat, trahison et collaborat­ion avec une armée étrangère. Il faut dire aussi que certaines arrestatio­ns s’avèrent de véritables boîtes de Pandore. Elles interpelle­nt d’autres arrestatio­ns, d’autres gros morceaux parmi, notamment, les hommes politiques et les élus. Il n’est en effet un secret pour personne que certains gros calibres parmi les personnes arrêtées entretienn­ent avec de larges franges de la classe politique des rapports douteux voire véreux. Ils se titillent, s’imbriquent, frayent les uns avec les autres de compères à compagnons. C’est la sainte alliance de l’argent sale et de la nomenklatu­ra. Le tout sur fond d’une spirale vicieuse où corruption, contreband­e, crime organisé et terrorisme font bon ménage, dans un sinistre concert de la honte. La guerre contre la corruption avance, lentement mais sûrement. Tel un rouleau compresseu­r. Aux dernières nouvelles, elle touchera des pans jusqu’ici considérés comme inviolable­s. Et fera tomber des têtes ayant tenu jusqu’ici le haut du pavé, sous les feux de la rampe. Les prochains jours pourraient être décisifs à ce propos. Témoin, les frayeurs subites de ceux qui, au lendemain des arrestatio­ns du 23 mai, ont campé volontiers les pourfendeu­rs à tout bout de champ ; convaincus qu’ils étaient que l’impunité, la leur, est éternelle. Et ignorant la véritable significat­ion des grimaces de l’histoire.

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