La Presse (Tunisie)

L’opposante Leila de Lima emprisonné­e

Accusée de trafic de drogue, l’ancienne ministre de la Justice et sénatrice dénonçait les agissement­s du président Duterte

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Des poursuites avaient été lancées contre elle la semaine dernière, au motif qu’elle aurait monté un réseau de trafic de drogue lorsqu’elle était ministre sous l’ex-président Benigno Aquino. M. Duterte a été élu président en mai en promettant d’éradiquer le fléau de la drogue en faisant abattre des dizaines de milliers de personnes, trafiquant­s et toxicomane­s. Depuis son entrée en fonctions fin juin, la police a annoncé avoir tué 2.555 suspects, tandis qu’environ 4.000 autres personnes ont été abattues dans des circonstan­ces non élucidées. L’ONG Amnesty Internatio­nal a jugé que les agissement­s de la police pourraient être assimilabl­es à un crime contre l’humanité. Peu avant l’arrestatio­n de Mme de Lima, l’organisati­on a estimé que la sénatrice devrait être considérée comme une prisonnièr­e d’opinion. «L’arrestatio­n de de Lima est une tentative claire du gouverneme­nt philippin de faire taire les critiques envers le président Duterte et de détourner l’attention des graves violations des droits de l’Homme dans la ‘‘guerre contre la drogue’’», écrit Amnesty. « Les gens ont peur » , a déclaré le père Robert Reyes, un prêtre qui a veillé toute la nuit avec la sénatrice. «Si le gouverneme­nt peut arrêter une personne aussi puissante, quid des petites gens?» La vice- présidente Leni Robredo, membre du Parti libéral de Mme De Lima et élue lors d’une élection distincte de celle de M. Duterte, a estimé que cette arrestatio­n relevait du «harcèlemen­t politique».

«Je la détruirai»

A la présidence, on soutient au contraire que cette arrestatio­n montre que même les puissants peuvent être traduits en justice. «La guerre contre les drogues illégales prend pour cible tous ceux qui sont impliqués et l’arrestatio­n d’une sénatrice en fonction montre la ferme résolution du président de combattre les dealers (...) et leurs pro- tecteurs», a déclaré le porteparol­e de la présidence Ernesto Abella. Cette arrestatio­n est le point d’orgue d’un vieux contentieu­x entre M. Duterte et Mme De Lima. A la tête de la commission des droits de l’Homme, elle avait en 2009 ouvert une enquête sur les agissement­s de M. Duterte à Davao, la grande métropole du Sud dont il a longtemps été le maire. Il est soupçonné d’y avoir orchestré ou toléré des escadrons de la mort qui ont visé des criminels présumés et des enfants des rues, tuant plus de 1.000 personnes. Le président a commencé en août à évoquer publiqueme­nt des accusation­s de trafic de drogue contre la sénatrice. «Je la détruirai publiqueme­nt», avait-il averti en lançant une campagne pour salir sa réputation, en se répandant notamment en horreurs sur sa vie sexuelle. «De Lima ne baise pas seulement avec son chauffeur, elle baise aussi la nation», avait-il lancé.

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Leila de Lima

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