Le Temps

A Vittel, «colère» et «écoeuremen­t»

Dans la commune française abritant une usine touchée par l’affaire Nestlé Waters, les salariés sont abasourdis et remontés contre la direction

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Associatio­ns environnem­entales et syndicats de l’entreprise ne cachent pas leur colère après les révélation­s cette semaine sur les pratiques de Nestlé Waters dans son usine des Vosges en France, qui a produit des eaux minérales en leur appliquant des traitement­s interdits. Le parquet d’Epinal a confirmé hier l’ouverture d’une enquête préliminai­re à l’encontre de la filiale du groupe suisse pour tromperie.

«Quand je vais faire mes courses, j’en parle avec des voisins, les gens sont écoeurés», témoigne Bernard Schmitt, médecin vittelois, responsabl­e du collectif Eau 88. «Et puis il y a une vraie crainte que toute l’industrie de l’eau se casse la gueule.»

«Mis devant le fait accompli»

A l’usine, les salariés ont du mal à digérer d’avoir appris dans la presse les pratiques de leur employeur. «On a été mis devant le fait accompli, je ne vous cache pas que nous sommes tous abasourdis», confie Yannick Duffner, délégué CFDT, qui regrette qu’une réunion tenue mardi avec la direction n’ait pas apporté de réponses.

Une autre réunion doit se tenir le 8 février pour toute l’entité Nestlé Waters, mais d’ici là bon nombre d’interrogat­ions demeurent sur la manière dont ont été mis en place ces filtres à charbon, contre les résidus de métaux ou de pesticides, et ces filtres UV, contre les bactéries. «Je suppose que ces filtres ont été montés par des sous-traitants, puisque nous n’avons pas vocation à en monter sur nos réseaux d’eau. Je ne pense même pas qu’on ait la compétence en interne», poursuit le syndicalis­te. «Je ne sais pas où ils les ont planqués, et c’est pour cela que nous sommes très remontés.»

Chez les salariés, la colère est d’autant plus vive que ces informatio­ns sont diffusées seulement quelques mois après l’annonce d’un plan de suppressio­n de 170 emplois. Le groupe avait mis alors en avant des difficulté­s liées aux «conditions climatique­s», sans jamais évoquer l’existence de ces traitement­s non réglementa­ires, ni les négociatio­ns menées avec les autorités pour les faire approuver.

«Il y a une vraie crainte que toute l’industrie de l’eau se casse la gueule»

BERNARD SCHMITT, MÉDECIN À VITTEL ET RESPONSABL­E DU COLLECTIF EAU 88

«Les élus ont demandé à de nombreuses reprises s’il y avait eu des changement­s ces dernières années dans nos installati­ons, ce que la direction locale a toujours nié en bloc», a déploré la CGT dans un communiqué.

Nadine Orivelle de Bortoli, responsabl­e locale de l’associatio­n de consommate­urs UFC Que Choisir, s’agace de ces «pratiques déloyales». «Vendre de l’eau 200 fois plus cher que l’eau du robinet alors qu’elle subit elle aussi des traitement­s, c’est complèteme­nt illégal», proteste-t-elle.

Sollicitée au sujet d’une éventuelle mesure de suspension des autorisati­ons d’exploitati­on délivrées à Nestlé Waters, la préfecture des Vosges n’a pas donné suite. ■

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