La Suisse dans une course contre la montre
Une équipe de sauvetage de 80 personnes intervient. Avec la difficulté de retrouver des survivants sous des montagnes de débris et dans le gel
Arielle, 61 ans, était sur le chemin du travail lorsqu'elle a appris qu'elle serait mobilisée. Enseignante dans une école primaire genevoise, elle a préparé son remplacement, expliqué à ses petits élèves qu'elle s'absenterait quelques jours. «Notre sac est toujours prêt. Quand on apprend notre engagement, on y glisse les dernières affaires et on part», ajoute-t-elle, de l'aéroport de Kloten, où elle a rejoint la chaîne suisse de sauvetage, mobilisée par la Direction du développement et de la coopération (DDC), sous la houlette du Département des affaires étrangères. Environ 80 personnes décollaient dans la soirée de lundi: des spécialistes membres de l'Aide militaire en cas de catastrophe de l'armée, des sismologues, des coordinateurs, des sauveteurs avec des chiens, dont Arielle.
Expertise
Elle fait partie de Redog, une association suisse de chiens de recherche et de sauvetage, qui mobilise douze personnes et huit chiens pour la Chaîne de sauvetage. L'association a également été contactée par un partenaire turc et envoie dix personnes et six chiens à bord d'un avion de la Rega. Leur précieuse expertise permettra de localiser les personnes prisonnières des décombres. L'enseignante part en tant que cheffe d'équipe et sera responsable de deux binômes chiens-sauveteurs sur place. Le but: «Sauver le plus de vies possible, de manière la plus sécurisée possible», résume Arielle.
Tout est allé vite lundi matin à la suite du séisme de magnitude de 7,8. Une cellule de crise a été rapidement mise sur pied au sein de la DDC et une première équipe suisse d'une dizaine de personnes, notamment du Corps suisse d'aide humanitaire, a été dépêchée en Turquie à bord de l'avion du Conseil fédéral pour évaluer les besoins dans les zones concernées et organiser les transports pour les sauveteurs qui suivront. «Car il faut s'y rendre dans la zone…», commente Ozgür Unal, chargé de communication de la DDC. «Nous arrivons dans une situation post-séisme, nous ne connaissons pas l'état des routes, ni si, par exemple, des viaducs sont coupés.» Selon les informations disponibles lundi après-midi, les équipes atterrissent à l'aéroport d'Adana, à 3 heures 30 de route de Gaziantep, une autre ville du sud de la Turquie touchée par le séisme. Il faut assurer un transport par bus et par camions, car les équipes amènent avec elles le matériel de premier secours, des modules médicaux et les tentes rudimentaires dans lesquelles certains dormiront. Les secours étrangers se doivent d'être autonomes.
Un autre enjeu de taille les attend: «La coordination. Il y a de nombreux secours internationaux et locaux sur place. Il faut être rapidement efficace dans une zone sinistrée très urbaine, avec des dégâts importants. Les durées de survie dans les décombres sont de troisquatre jours. S'ajoutent les risques d'hypothermie en raison des basses températures», explique Ozgür Unal. Si l'épicentre du séisme se trouve en Turquie, le tremblement de terre a tué en Syrie aussi. «Il est plus difficile d'envoyer des équipes pour des raisons sécuritaires. La DDC étudie les possibilités d'aide pour la Syrie, via ses bureaux dans la région. Les informations remontant de la zone sont éparses. Nous sommes en contact avec nos partenaires et les instances onusiennes dans la région. Nous évaluons les possibilités d'aide financière», ajoute-t-il.
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