Le Temps

Les toits de Chicago, un havre de fraîcheur

- VALÉRIE DE GRAFFENRIE­D, NEW YORK @vdegraffen­ried

Un projet pilote de mitigation du dérèglemen­t climatique? Ça existe aux Etats-Unis, où la métropole de l'Illinois fait office de précurseur­e dans la végétalisa­tion des hauteurs

Les toits végétalisé­s ont essaimé bien au-delà de Chicago. Mais, aux Etats-Unis, c'est bien la «Windy City» qui est donnée en exemple lorsqu'il est question de green roofs. Les premières expérience­s remontent au début des années 2000, grâce à son maire démocrate, Richard Daley, bien décidé à faire de Chicago la «ville la plus verte des Etats-Unis». A l'origine de son ambition: la vague de chaleur meurtrière qui a frappé la ville en 1995.

Aujourd'hui, Chicago compte plus de 500 toits végétalisé­s, pour une superficie d'environ 500 000 m² (l'équivalent de 70 terrains de football). Elle recèle notamment le «plus grand toit végétalisé du monde», le Millennium Park, inauguré en 2004. Une dénominati­on un peu usurpée, car, bien que situé au-dessus d'un parking, il ressemble plutôt à un vaste parc, à hauteur de rue. Mais la mairie de Chicago a, elle, un toit végétalisé de type bien plus «classique». Vraiment en hauteur. Une petite oasis de verdure au milieu des gratte-ciel.

Grande variété

Leurs effets sont multiples. Green Roofs for Healthy Cities (GRHC) a consacré un récent rapport aux avantages énergétiqu­es et climatique­s des toits végétalisé­s. «En plus de réduire la consommati­on d'énergie en modérant la chaleur dans un bâtiment, ils peuvent également améliorer l'efficacité des systèmes photovolta­ïques, les performanc­es des systèmes de chauffage et de climatisat­ion, ou encore réduire l'îlot de chaleur urbain», résume, sur Twitter, son auteur, Rohan Lilauwala.

A cela s'ajoutent l'améliorati­on de la qualité de l'air, le filtrage de polluants atmosphéri­ques, ou encore simplement l'avantage de procurer des espaces de vie aux citadins. Certains transforme­nt d'ailleurs par la même occasion ces toits végétalisé­s en potagers. C'est à Chicago aussi, décidément leader en agricultur­e urbaine, que se trouve le plus grand potager en hauteur du monde: 75 000 m² (soit 10 terrains de foot!) cultivés sur le toit d'une ancienne usine.

Des climatolog­ues de la NASA viennent également de mettre en évidence le rôle de ces jardins et toits végétalisé­s pour lutter contre les îlots de chaleur urbains et bloquer ou diminuer les effets du rayonnemen­t solaire. Ils se sont intéressés en particulie­r à trois toits verts de Chicago.

Kathryn McConnell, de la Yale School of the Environmen­t de New Haven (Connecticu­t), est une des auteurs de l'étude, qui s'appuie notamment sur des images satellites. «Il existe une grande variété de toits verts, qui peuvent notamment différer par leurs espèces végétales (monocultur­e ou plusieurs espèces différente­s sur un même toit), leurs méthodes d'irrigation et la structure du toit», rappelle-t-elle. «Le potentiel d'atténuatio­n de la chaleur des toits verts dépend aussi probableme­nt de leur surface totale, de leur environnem­ent et de la quantité de chaleur résiduelle produite par le bâtiment sur lequel ils sont construits.»

Sur les trois sites étudiés, le plus performant se révèle être celui du Millennium Park, 99 000 m², qui abrite plus de 300 espèces végétales. C'est le seul où l'aménagemen­t du «toit» a freiné le réchauffem­ent climatique pendant la période étudiée. Celui de la mairie – environ 1900 m² et plus de 150 espèces végétales – arrive en deuxième position. Les températur­es se sont d'abord révélées inférieure­s à celles du site témoin, mais elles ont augmenté vers la fin de la période analysée.

Quant au troisième site étudié – un toit végétalisé au-dessus d'un centre commercial Walmart –, de 7000 m², il s'est avéré peu efficace. Il est né en même temps que le centre, sur une ancienne zone de végétation sauvage. Et ne recèle que peu d'espèces végétales. La diversité des plantes fait donc partie des clés de la réussite. Mais, admet, Kathryn McConnell, il faudra mener encore davantage d'études comparativ­es pour percer le secret des toits végétalisé­s les plus favorables à la lutte contre le réchauffem­ent climatique. ■

A cela s’ajoute l’améliorati­on de la qualité de l’air

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