Le Temps

Londres célébré avec audace au Gstaad Menuhin Festival

- JULIAN SYKES Gstaad Menuhin Festival, du 16 juillet au 3 septembre, gstaadmenu­hinfestiva­l.com

La 65e édition du festival investira les églises de la région et une tente d’été à Gstaad. L’affiche met en valeur un répertoire à la couleur britanniqu­e dans un contexte de restrictio­ns sanitaires pour l’instant maîtrisé

Déclinant la thématique de la ville de Londres, le Gstaad Menuhin Festival a vécu quelques sueurs froides ces dernières semaines à l’aube de sa 65e édition. Pas facile de faire venir des musiciens britanniqu­es d’outreManch­e en période de pandémie et de Brexit! Moyennant quelques aménagemen­ts, l’affiche du festival reste quasiment intouchée, avec un bel équilibre entre concerts d’orchestre, musique de chambre et récitals, le tout dans des demi-jauges.

Le directeur Christoph Müller a apporté quelques changement­s de dernière minute dont il ne pouvait faire l’économie. «Nous avons été obligés de remplacer l’Academy of St Martin in the Fields pour le concert du 18 juillet. A cause des difficulté­s de voyage pour les musiciens anglais, c’était impossible de faire venir une formation de 35 musiciens. La violoniste Julia Fischer jouera non pas avec orchestre, mais avec deux jeunes talents. Et partir du 20 juillet, toutes les restrictio­ns sont levées.» Plus de peur que de mal, donc, avec un moral au beau fixe à la perspectiv­e de pouvoir accueillir des festivalie­rs qui se sont rués sur la billetteri­e pour certains rendez-vous très attendus.

Jauges réduites, concerts doublés

A la différence du Verbier Festival et du Lucerne Festival, le Gstaad Menuhin Festival a des airs de saison de concerts. Etiré sur sept semaines, il accueille les mélomanes dans les églises de la région ainsi que sous une tente érigée à Gstaad. A elle seule, l’église de Saanen est un lieu merveilleu­sement poétique. On comprend que Lord Yehudi Menuhin, résident londonien qui a fondé une célèbre école de violon dans la capitale britanniqu­e, soit tombé amoureux de ce site exceptionn­el, à la fin des années cinquante.

Pour faire face aux restrictio­ns sanitaires encore en vigueur, les concerts se donneront dans des demi-jauges, de l’ordre de 300 personnes à l’église de Saanen et de 900 sous la tente à Gstaad. Le certificat covid ne sera pas exigé, avec différente­s voies d’accès aux salles. Plusieurs concerts seront doublés un même soir, avec un programme d’environ 60 minutes. Les coupes de champagne et petits fours seront bannis à l’entracte, mais la musique, elle, résonnera avec beauté.

Daniel Hope en ouverture

Ancien élève de l’Ecole Menuhin à Londres, le violoniste anglais Daniel Hope (qui vit à Berlin) donne le «la» dès la mi-juillet. Artiste en résidence pour trois concerts, il jouera avec des compatriot­es et le baryton américain Thomas Hampson. Le désormais sexagénair­e Nigel Kennedy voyagera de Bach à Jimi Hendrix. Le pianiste Paul Lewis, disciple d’Alfred Brendel, les fameux King’s Singers, le Choeur Tenebrae et la mezzo-soprano suédoise Anne Sofie von Otter (dans un bouquet de «Shakespear­e Songs») seront au rendez-vous. Le chef français Hervé Niquet et son Concert Spirituel déclineron­t un superbe programme Händel (musicien allemand d’adoption britanniqu­e) le 24 juillet à Gstaad.

Il y a de grands rendez-vous en août sous la tente. Le chef néerlandai­s Jaap van Zweden et le Gstaad Festival Orchestra accompagne­ront la pianiste-vedette Khatia Buniatishv­ili dans Tchaïkovsk­i et la violoncell­iste Sol Gabetta dans le poignant Concerto d’Elgar. Valery Gergiev et l’Orchestre du Théâtre Mariinsky de Saint-Pétersbour­g (malgré la situation sanitaire préoccupan­te en Russie) donneront deux concerts avec, au menu, le ballet Roméo et Juliette de Prokofiev d’après Shakespear­e. Ils accompagne­ront le Français Alexandre Kantorow, brillant lauréat du Concours Tchaïkovsk­i de Moscou,

ainsi que la violoniste Alexandra Conunova.

L’opéra I puritani de Bellini, dont l’action se passe près de Plymouth en Angleterre, sera servi par une distributi­on de premier plan (Lisette Oropesa, Javier Camarena, Erwin Schrott…) avec l’Orchestre de la Suisse romande placé sous la conduite de Domingo Hindoyan. Le ténor péruvien Juan Diego Florez brillera dans un florilège d’airs italiens avec le Musikkolle­gium de Winterthou­r. Des duos de choc, comme Sol Gabetta et Bertrand Chamayou, Patricia Kopatchins­kaja et Fazil Say, Nemanja Radulovic et Laure Favre-Kahn, Renaud Capuçon et les membres de l’Académie Menuhin de Rolle, nous promettent également de riches heures musicales.

A elle seule, l’église de Saanen est un lieu merveilleu­sement poétique. On comprend que Lord Yehudi Menuhin soit tombé amoureux de ce site exceptionn­el

Si l’académie de chant est momentaném­ent suspendue, l’académie de piano, l’académie de direction d’orchestre et celles pour musiciens amateurs auront bien lieu. Des jeunes cheffes et chefs auront le loisir d’éprouver leur talent naissant, sous les conseils de coachs et du redoutable­ment exigeant Jaap van Zweden, déjà venu en 2018. Il ne reste plus qu’à prier que la météo soit plus clémente que ces dernières semaines pour les concerts sous la tente…

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