La vérité mais je mens
Il est assez étrange de découvrir un film francophone en sachant que son auteur ne parle pas un traître mot de français. Ainsi, lorsqu’un dialogue sonne mal, que l’intention d’un comédien semble surfaite, on ne peut s’empêcher de penser qu’il y a eu là un problème de communication. C’est ce qui frappe d’abord dans La Vérité: on peine parfois à véritablement se sentir proche des personnages. Un sentiment d’autant plus frustrant qu’Hirokazu Kore-eda est un miniaturiste capable de faire passer beaucoup d’émotion avec trois fois rien.
Dans sa filmographie, ce quatorzième long métrage restera comme un film sans véritable enjeu, là où Nobody Knows (2004) ou Une Affaire de famille (2018) bouleversaient en s’emparant de sujets de société forts. Le scénario de cette comédie de moeurs s’avère par contre enthousiasmant dans sa manière d’encastrer une fiction dans une autre.
Fabienne (Catherine Deneuve) est une grande comédienne qui ne s’est jamais véritablement occupée de sa fille Lumir (Juliette Binoche). Lorsqu’elle va devoir incarner l’enfant vieillissante d’une mère à la jeunesse éternelle dans un film de science-fiction, voilà qu’elle va se retrouver face à ses propres contradictions, elle qui dans ses mémoires s’est donné le beau rôle. Car on n’attend quand même pas d’une actrice qu’elle dise la vérité, estime Fabienne.
Si le face-à-face entre Deneuve et Binoche s’avère finalement déceptif, les questions que soulève le film sur le pouvoir du cinéma en tant que révélateur lui donnent ainsi une intéressante épaisseur narrative. La Vérité est finalement moins une réflexion sur une famille désunie que sur les acteurs et le jeu.n
«La Vérité», de Hirokazu Kore-eda (France, Japon, 2019), avec Catherine Deneuve, Juliette Binoche, Ethan Hawke, Clémentine Grenier, Ludivine Sagnier, 1h47.