«Ça» nous ennuie à mort
Un extraterrestre déguisé en clown terrifie les enfants d’une petite ville. Trente ans plus tard, ils reviennent détruire le monstre. Bruyant, laid, interminable, le second chapitre de l’adaptation du roman de Stephen King est une pénible épreuve
Déjà adapté au début des années 1990 en mini-série télévisée, Ça a fait en 2017 l’objet d’un film qui a rapporté plus de 700000 millions de dollars (vingt fois sa mise…), ce qui exigeait la suite et fin. Le diptyque originel de Stephen King fait des allers et retours entre le passé (les années 1950) et le présent (les années 1980) pour raconter comment sept gamins marginalisés de Derry (ville imaginaire du Maine) affrontaient un clown maléfique, marionnette d’une entité extraterrestre tapie dans les profondeurs, et comment ils reviennent vingt-sept ans plus tard pour achever le monstre. Andy Muschietti a préféré ne pas mélanger les périodes: Ça relate les terreurs de 1989 et Ça: Chapitre 2, entrelardé d’indispensables flash-back explicatifs, leur résurgence contemporaine.
Révélé par Mamá, une histoire de fantômes assez angoissante dont l’originalité est sans doute liée à sa culture argentine, Andy Muschietti a renoncé à toute subtilité en adaptant Stephen King (l’écrivain fait un caméo en brocanteur). Devenus grands, les enfants de Derry retournent dans leur patelin la peur au ventre pour le round final. Bill, Richie, la rousse Beverly et les autres recherchent les traces du passé à travers Derry et se font bousculer par des forces surnaturelles hautement grotesques. Les égouts régurgitent des cadavres démembrés, les Fortune Cookies accouchent de créatures hideuses, sous un lit de l’asile psychiatrique un ballon rouge explose révélant un zombie, le clown se laisse pousser des mâchoires de mosasaure pour arracher le visage ou le coeur des innocents…
Arthropode infernal
Le titre de l’oeuvre contient une promesse, celle de mettre un masque au ça, l’ensemble des pulsions inconscientes de la psychanalyse. L’exercice requiert une finesse dont Stephen King est dépourvu et Andy Muschietti plus encore, comme en atteste un sound design monstrueusement agressif. Ignorant que le principe de l’érotisme («c’est plus excitant quand c’est suggéré») s’applique aussi à l’horreur, le réalisateur construit son scénario sur le modèle d’un tour en train fantôme et aligne les jump scares comme des noix sur un bâton. La statue géante d’un bûcheron ouvre une gueule d’ombre pleine de chauves-souris, une tête humaine se transforme en arthropode infernal, un lépreux doté d’une langue pénienne attaque…
Le clown se métamorphose sans cesse tandis que, noyés dans le sang, perdus dans des labyrinthes, ensevelis dans la crasse et la sanie, les personnages se perdent dans une enfilade de cauchemars. Appliquant la devise des Mousquetaires, «Un pour tous, tous pour un», ils arrivent à pratiquer le rituel indien susceptible de ratatiner définitivement l’alien hostile. Ouf. ▅
Ça: Chapitre 2 (It Chapter Two), d’Andy Muschietti (Canada, Etats-Unis, 2019), avec Jessica Chastain, James McAvoy, Bill Skarsgard, Bill Hader, Isaiah Mustafa, 2h49.