Le Temps

Eric Stauffer de retour? Genève n’y croit pas

- SYLVIA REVELLO SylviaReve­llo COLLABORAT­ION: GRÉGOIRE BAUR

Les intentions de l’ex-tribun MCG, exilé en Valais, peinent à convaincre au bout du lac, où sa crédibilit­é semble sérieuseme­nt entamée

Eric Stauffer songe à revenir sur la scène politique genevoise, tout en laissant planer le mystère sur la nature du parti ou de l’alliance qu’il pourrait rejoindre. Au bout du lac, la nouvelle fait doucement sourire. Avec un parcours jalonné de coups d’éclat et de volte-face, l’ex-tribun MCG, désormais installé en Valais, n’en est pas à son premier rebondisse­ment. Une «girouette à l’ego surdimensi­onné», un «jusqu’au-boutiste accro au pouvoir»: les mots sont parfois durs pour qualifier celui qui a bâti son succès sur la thématique des frontalier­s.

Un retour «inenvisage­able»

«Il n’a pas réussi à percer en Valais, donc il revient à Genève, il fallait s’y attendre, juge Caroline Marti, vice-présidente du Parti socialiste genevois. Il a toujours aimé jouer sur les effets d’annonce, mais ça ne marche plus.» En l’absence de programme, elle ne se prononce pas sur ses chances de réussite. «Veut-il reconquéri­r le MCG? se questionne Nicolas Walder, président des Verts genevois. Je l’imagine mal dans un autre parti.» A ses yeux, Genève a suffisamme­nt d’affaires à gérer en ce moment pour se permettre d’accueillir de nouveau le «trublion de la République».

Premier et unique élu MCG au gouverneme­nt genevois, Mauro Poggia se montre lui aussi pessimiste. «Malgré toute l’amitié que je lui porte, il a fait le mauvais choix en claquant la porte du MCG. Il sera difficile pour lui d’effacer l’ardoise et de recommence­r à zéro, la population genevoise a une mémoire.» Le conseiller d’Etat reconnaît qu’en 2005 Eric Stauffer était la «bonne personne au bon moment». «Il fallait un bulldozer, quelqu’un qui ose lancer des pavés dans la mare, briser les tabous, ça a été très efficace notamment sur la préférence cantonale, qui est désormais généraleme­nt admise. Mais sur quels thèmes pourrait-il mobiliser aujourd’hui?» Quant à un éventuel retour au MCG, Mauro Poggia le juge «inenvisage­able».

«Les gens ont tourné la page, la place est prise»

«Il faut croire que la passion de la politique l’habite encore, mais à force de changer de canton pour trouver une famille politique, sa crédibilit­é en a pris un coup, souligne Céline Amaudruz, présidente de l’UDC genevoise. A l’époque, il avait demandé à rejoindre l’UDC, ce que nous avions refusé. S’il se présente aux élections nationales sans être affilié à un parti bien implanté, ses chances d’être élu sont quasi nulles.» L’ex-PDC Guy Mettan, qui sera l’unique candidat de sa liste Planète bleue, juge quant à lui ce retour contradict­oire et prématuré. «Les gens ont tourné la page et lui aussi. Aujourd’hui la place est déjà prise», souligne-t-il, estimant que si le retour d’Eric Stauffer se confirme, ce sera surtout au détriment du MCG.

Avant de se tourner vers Genève, Eric Stauffer a approché les Vert’libéraux valaisans, qui viennent de faire leur apparition dans le canton. «Il n’y a pas eu une approche officielle, mais plutôt une tentative indirecte», reconnaît Philippe Jansen, le coordinate­ur pour le Bas-Valais, qui souligne que l’offre a été rapidement balayée. Alexandre Peyraud, président des Vert’libéraux genevois, n’a quant à lui pas été approché. «Si Eric Stauffer se lance à Genève en créant un nouveau parti, il pourrait faire du mal au MCG, à l’UDC voire au PLR en leur volant des voix. Certains partis à la limite du quorum pourraient aussi tomber à cause de lui.»

«Agir en silence»

«Revenir oui, mais avec quel programme?» questionne André Leitner, vice-président du PBD genevois. «En 2018, Eric Stauffer a tout misé sur Genève en marche, mais ça a échoué. En politique, il ne suffit pas de faire du bruit, il faut aussi agir. Et ça se passe souvent en silence, ce qui n’est pas son fort.»

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