Donald Trump se garde de lancer la guerre totale
Les tensions entre les Etats-Unis et les pays exportateurs d’acier et d’aluminium ont baissé d’un cran. Contrairement aux affirmations du président américain, les Etats «amis et alliés» pourraient être exemptés de sanctions. Les marchés financiers apprécient
La guerre commerciale totale entre les Etats-Unis et le reste du monde n'aura vraisemblablement pas lieu. Le président américain qui avait menacé, il y a dix jours, d'imposer une surtaxe de 25% sur l'acier et de 10% sur l'aluminium importés aux Etats-Unis «pour tous les pays» et «pour une longue période» a changé de stratégie. En signant le décret présidentiel jeudi soir à Washington, il a provisoirement exempté le Canada et le Mexique de ses sanctions.
De plus, il a laissé la porte ouverte à tous les autres exportateurs «amis et alliés» pour qu'ils puissent réclamer la même concession. «Il a agi en diplomate et de façon équilibrée, maniant le bâton et la carotte, analyse Patrice Gautry, chef économiste d'Union bancaire privée à Genève. Donald Trump a choqué pour provoquer des négociations qui, espère-t-il, tourneront à son avantage.»
Preuve que la crainte d'une guerre commerciale annoncée par Donald Trump et redoutée dans le monde s'est estompée, les principales places financières ne se sont pas affolées vendredi. En Asie et en Europe, elles ont évolué de façon hésitante, mais ont clôturé dans le vert vendredi. Il y a douze jours, lorsque le président américain avait fait part de ses intentions, les bourses mondiales avaient plongé de plusieurs points.
Le sommet annoncé entre le président américain, Donald Trump, et le président nord-coréen, Kim Jong-un, a aussi calmé les tensions. De surcroît, la création inattendue de 313 000 emplois en février aux Etats-Unis a également rassuré les marchés. La catastrophe annoncée liée à une éventuelle guerre commerciale n'a donc pas eu lieu.
Bruxelles souffle le chaud et le froid
La balle est maintenant dans le camp des exportateurs d'acier et d'aluminium. Le Canada, premier fournisseur des Etats-Unis avec une part de 16,7% des importations totales, a fait savoir qu'il voudrait une exemption permanente. Japonais et Sud-Coréens ont déjà envoyé des délégations à Washington pour plaider leur cause. Les deux pays font remarquer qu'ils sont des alliés indéfectibles des Etats-Unis en politique internationale et de défense.
L'Australie et le Royaume-Uni se sont déclaré candidats à l'exemption. Pour sa part, l'Union européenne (UE) souffle le chaud et le froid. Cecilia Malmström, la commissaire au Commerce, a affirmé vendredi à Bruxelles que le dialogue avec les Etats-Unis restait la première option. «Nous ne pouvons pas être une menace pour la sécurité nationale des Etats-Unis, donc nous comptons être exemptés», a-t-elle dit. Mais elle a aussi rappelé que l'UE était sur le point de finaliser une liste de produits américains qui feraient éventuellement l'objet de mesures de rétorsion.
Angela Merkel inquiète
Au sein de l'UE, qui exporte 5 milliards d'euros d'acier et un milliard d'euros d'aluminium par an vers les Etats-Unis, c'est l'Allemagne qui en est le plus grand exportateur. La chancelière, Angela Merkel, s'est dite «inquiète» vendredi. La veille, le président américain avait ciblé Berlin pour ses excédents commerciaux et ses dépenses militaires trop faibles au sein de l'OTAN.
Comme l'Allemagne, la Chine, qui compte pour moins de 3% des importations américaines, s'est sentie particulièrement visée par les propos du président américain. Mais, contrairement à Berlin, Pékin ne s'est pas montré conciliant. Selon le Global Times, journal en ligne et porte-voix des autorités chinoises, le ministère du Commerce a dénoncé «une attaque délibérée du système commercial multilatéral. Nous prendrons des mesures effectives pour sauvegarder nos droits et intérêts légitimes.»