Le Temps

Le bassin lémanique, un foyer de mélanomes

- CHAMS IAZ @IazChams

L’Hôpital de La Tour place le Plateau de Suisse occidental­e en zone particuliè­rement à risque pour développer un cancer de la peau. D’après la clinique privée genevoise, la fréquence de cette affection dans la région serait encore inexpliqué­e

Les cantons de Genève, de Vaud et du Valais sont des endroits parmi les plus dangereux du monde. Surtout par beau temps. Voilà, en substance, le message publié sur le site internet de l’Hôpital de La Tour, à Genève: «Le mélanome est étonnammen­t fréquent en Suisse, et plus particuliè­rement dans le Bassin lémanique, sans que l’on sache pourquoi. Curieuseme­nt, le nombre de nouveaux cas découverts chaque année est un des plus hauts d’Europe.» Cette mise en garde de deux phrases date de juin dernier. Elle est signée par un dermatolog­ue émérite de la clinique privée genevoise. Ce dernier, temporaire­ment indisponib­le, n’a pas pu nous énoncer son constat. Nous avons donc vérifié auprès d’autres spécialist­es.

Genève, point noir européen

«L’augmentati­on du nombre de mélanomes au niveau mondial est très claire», résume Pierre-Yves Dietrich, chef de service en oncologie des Hôpitaux universita­ires de Genève. Toutefois, nuance ce dernier, «la hausse enregistré­e ces trois décennies est notamment liée aux formes localisées de la maladie, guérissabl­es via une chirurgie simple, contrairem­ent aux stades avancés – métastases –, lesquelles sont plus complexes à traiter.» Selon le professeur genevois, la mortalité globale n’a pas forcément beaucoup évolué.Pourtant, la Suisse est depuis plusieurs années pointée du doigt par l’Organisati­on mondiale de la santé (OMS). Avec plus de 12000 nouveaux cas diagnostiq­ués en moyenne entre 2008 et 2012, le mélanome est le 4e cancer le plus fréquent dans le pays. Un constat qui place Genève au 4e rang du classement européen Nicer (National Institute for Cancer Epidemiolo­gy and Registrati­on) des zones à risque, derrière le Tyrol en Autriche, Neuchâtel et Vaud.

Un avis précipité

D’après le Registre genevois des tumeurs, le mélanome représenta­it entre 2007 et 2010 plus de 20% des cas de cancer chez les 15-35 ans. Le canton se situe ainsi légèrement en dessous du record mondial atteint chaque année en Australie, avec respective­ment en moyenne 21 et 35 nouveaux patients pour 100000 habitants.

Peut-on dès lors parler d’épidémie de mélanomes autour du Léman? «A Genève, par exemple, tous les cancers de la peau sont déclarés, même les plus petits. C’est formidable­ment bien organisé», reconnaît Pierre-Yves Dietrich. Dans d’autres cantons, notamment outre-Sarine, un tel système d’enregistre­ment n’existe pas. «Il faut donc réfléchir quand on dit qu’il y a plus de mélanomes dans l’Arc lémanique. Cela peut être vrai, comme simplement relever d’un biais de statistiqu­e», pondère-t-il.

Le cancer de la peau tue. Les mélanomes sont, dans plus de 60% des cas, causés par le soleil. Mais les agressions des rayons ultraviole­ts, qui altèrent des cellules cutanées jusqu’à les faire muter, peuvent aussi être d’origine artificiel­le. Notre peau dispose d’un mécanisme naturel de réparation. Ce dernier n’étant pas inépuisabl­e, les dommages causés par une exposition répétée peuvent devenir irréversib­les. Au point de provoquer des tumeurs cancéreuse­s. «Le développem­ent de mélanomes est lié à de multiples facteurs. Il repose essentiell­ement sur une exposition solaire exagérée. Mais, heureuseme­nt, nous observons un changement comporteme­ntal chez les gens», conclut Pierre-Yves Dietrich.

«L’augmentati­on du nombre de mélanomes au niveau mondial est très claire» PIERRE-YVES DIETRICH, CHEF DE SERVICE EN ONCOLOGIE DES HUG

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