Monaco-Matin

Jean Dujardin ENFILE LE MASQUE DE ZORRO

- MATHIEU FAURE mfaure@nicematin.fr « Zorro », disponible sur Paramount +.

Portée par un casting étoilé (Jean Dujardin, Audrey Dana, Grégory Gadebois, André Dussollier), l’adaptation française du mythe de Don Diego de la Vega, dit Zorro, signe sa réussite de la pointe de son épée.

Sur le papier, cela ressemblai­t à un pari risqué. Un héros espagnol mondialeme­nt connu, Don Diego de la Vega dit Zorro, venu des États-Unis pour une série française, tournée en français et portée par un casting tricolore de premier plan : Jean Dujardin, Audrey Dana, Grégory Gadebois, André Dussollier. Et pourtant, la série de huit épisodes proposés ce vendredi sur Paramount +, et diffusée plus tard sur France 2, est une franche et belle réussite. Visuelleme­nt impeccable, la série surprend par son ton, son humour, ses thématique­s très contempora­ines. Un projet porté par un Jean Dujardin retrouvé, parfait dans les deux rôles, celui de l’homme masqué et de Don Diego de la Vega. Il faut dire que ce projet est un peu le sien si on en croit Benjamin Charbit, l’un des scénariste­s : « Le projet est venu de Marc Dujardin, le frère de Jean, qui nous a proposé cette idée. Je me suis dit qu’il a trop vu son frère jouer à Zorro dans leur jardin durant leur enfance et qu’il a eu envie d’offrir un Zorro grandeur nature à son frère... »

Zorro, héros qui parle à toutes les génération­s, et ce n’est pas André Dussollier, qui prête ses traits au père de Don Diego de la Vega, qui dira le contraire. « C’est le feuilleton que j’ai vu en noir et blanc dans ma jeunesse, Zorro le justicier. Il y en a eu beaucoup des Zorro en 100 ans, c’est un genre qui a été renouvelé. Benjamin Charbit et Noé Debré, les deux scénariste­s, ont remis Zorro au goût du jour. Il y a de la profondeur, du relief, de la comédie, de l’humour », lance-t-il.

Audrey Dana, magnétique en Gabriella, femme du héros, estime, elle, que « Zorro est ce qu’est Batman actuelleme­nt pour les gamins, c’est le premier héros masqué. »

Vaudeville dans le désert

Pour pimenter la série, les scénariste­s ont décidé d’installer une forme de comédie-vaudeville au sein du foyer de Zorro. « ‘‘L’Amant’’ d’Harold Pinter a été une référence pour le triangle amoureux avec le même homme, c’est réjouissan­t à jouer. On se demande comment elle fait pour ne pas le reconnaîtr­e, elle n’imagine

pas une seule fois son mari être Zorro, elle vit aveuglémen­t cette histoire d’amour avec cet homme masqué. L’amour rend aveugle il paraît (rires) », poursuit Audrey Dana.

« Dès le départ, pour Jean, on a envie de lui proposer une partition comique, embraye Benjamin Charbit. On est très vite sur l’idée du vaudeville avec l’amant et le mari qui sont la même personne ». Autre coquetteri­e qui fonctionne parfaiteme­nt, le rôle d’André Dussollier en père exigeant qui, après sa brutale mort dans le pilote, revient hanter son fils, Don Diego de la Vega. « C’est amusant de jouer un père qui meurt et qui rôde ensuite autour de son fils, comme un fantôme. Il réapparaît souvent, y compris dans l’intimité, pour lui donner son avis sur tout. Il y a toujours des choses irrésolues entre un père et son fils, c’est quelque chose qui parle à tout le monde. C’est un père qui estime que son fils n’est pas à la hauteur (rires). C’est bien d’avoir mis le héros plus bas que terre dès le départ... »

Autre personnage iconique de l’univers Zorro, le sergent Garcia, homme bedonnant et pas très malin qui, dans l’imaginaire des gens, peinait à traquer Zorro. Dans cette nouvelle version, c’est Grégory Gadebois qui hérite du rôle et lui donne une nouvelle dimension. « Je me suis peu inspiré

de l’ancienne série et du personnage du sergent Garcia. Le personnage actuel s’est dessiné tout seul, il a un côté Hercule Poirot, et c’est 20 ans après la série originale, il représente monsieur tout le monde. Il est à la fois admiratif de Zorro et son travail est de l’arrêter car c’est un homme du peuple. Il est entre les deux », tranche Gadebois.

Pas de saison deux au programme

Et quid de Bernardo, le fidèle serviteur muet de Zorro et parfaiteme­nt campé par Salvatore Ficarra ? Benjamin Charbit : « C’est Paramount qui nous a proposé un acteur italien très connu car l’Italie produit aussi la série. C’était à double tranchant et, au final, c’est une divine surprise. La finesse de son jeu, tout ce qu’il fait passer dans son regard, la complicité avec Jean. Et a posteriori, qui mieux qu’un Italien pour parler avec les mains ? »

Malgré tout, il fallait que cette série française soit crédible. Visuelleme­nt. Esthétique­ment. Scénaristi­quement. Et c’est le cas. « C’est un héros espagnol qui vient des USA et qui va être interprété par un acteur français. Pour y croire, il fallait être précis dans les décors, dans les costumes, dans ce que l’on voit, tranche Charbit. On a eu un parti pris : les rôles

Visuelleme­nt impeccable, la série surprend par son ton, son humour, ses thématique­s très contempora­ines

principaux parlent un français impeccable, les autres couches de la population vont parler avec un accent espagnol et, parfois, les figurants parlent carrément espagnol. C’est notre règle du jeu et on a l’intuition que ce traitement des langues passe bien à l’écran. » Pour Audrey Dana, l’autre innovation passe par la manière dont le propos est traité. «Cequim’aplu dans cette adaptation c’est la nouveauté, on rentre par la porte du classique, des décors, des costumes et on y a apporté quelque chose de différent : la forme, le ton, ce qui se raconte est résolument moderne. Il y a une touche Dujardin, car il habite le rôle, et Jean est résolument français. L’humour est français, il y a un travail autour de la psychologi­e des personnage­s, sur le féminisme. » Audrey Dana met en exergue l’évidence, Jean Dujardin était fait pour ce rôle. « Le masque allait tellement bien à Jean. »

« Les habits, l’épée, se déplacer à cheval, on se prend très vite au jeu, surtout quand on voit Jean à cheval, conclut Gadebois. Ona tourné là où Sergio Leone avait fait ses westerns, on n’a pas forcément raisonné en termes de moyens mais on était surtout entouré de gens compétents, de costumes magnifique­s. »

Cette série, qui n’a pas été écrite pour avoir de suite, confirme la capacité des production­s françaises à être capables de rivaliser avec les production­s américaine­s. Ce qui n’est pas rien.

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(Photo Paramount +) Jean Dujardin et Audrey Dana en pleine conversati­on pointue ! nd

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