« En 20 ans, la biodynamie a explosé »
Alain Régnault, auditeur pour Demeter France
Dans la mythologie grecque, Déméter était la déesse de l’agriculture et des moissons. C’est aussi le nom d’une marque de certification internationale, choisie par la coopérative des Vignerons de Correns pour son premier contrôle. L’auditeur, Alain Régnault, s’est rendu sur place à plusieurs reprises.
Qu’est-ce que la biodynamie ?
L’action de la biodynamie se situe dans l’utilisation de préparations à base de plantes, ou d’origine minérale (silice de corne) ou organique (bouse de vache) à doses infinitésimales.
Elles sont dynamisées et pulvérisées à faible dose sur les cultures ou sur le sol, ou utilisées dans les composts. Elles ont pour but d’optimiser le compostage, de stimuler la vie du sol, de renforcer les plantes et la qualité des produits agricoles. La biodynamie c’est aussi l’enthousiasme, la force des intentions.
Certains travaillent aussi selon les cycles solaires, lunaires…
Les jardiniers les prennent en compte depuis des centaines d’années. Mais le calendrier n’est pas dans le cahier des charges.
Est-ce que cette méthode, controversée par ailleurs, repose sur des preuves scientifiques ?
Une étude est menée par l’Inrae (Institut national de la recherche agronomique, Ndlr) de Dijon sur l’effet de la biodynamie sur les sols. Les résultats préliminaires sont intéressants au niveau des interactions entre les bactéries et les champignons. Les chercheurs observent une augmentation très significative entre les parcelles cultivées en bio (1 700 liens) et celles cultivées en biodynamie (49 000 liens), soit 30 fois plus d’interactions. Ils constatent, mais ne savent pas à ce jour expliquer l’origine de ces résultats.
Lors d’un audit, que contrôlez-vous ?
On s’appuie sur la certification agriculture biologique, que le client doit déjà avoir. Le contrôle porte sur les achats et l’élaboration des préparations, les bons de livraison, factures et dates de passage pour vérifier qu’il y a bien en quantité et qualité minimum, les conditions de stockage.
On fait le rapprochement entre les quantités de préparations et les surfaces. On va aussi dans le vignoble, on regarde le matériel. Lors de l’audit, il y a un échange, à partir du constat sur le terrain, pour savoir si la pratique est conforme. D’ailleurs, le cahier des charges exige deux jours minimum de formation. Ce dossier est atypique. La coopérative de 30 viticulteurs prend en charge les préparations et assure la prestation de service. C’est un bon point de départ, on souhaiterait que chaque agriculteur de la coopérative fasse la démarche personnelle.
La biodynamie a le vent en poupe. La démarche est-elle sincère ou motivée par des raisons commerciales ?
En 20 ans, la biodynamie a explosé. Aujourd’hui, beaucoup de gens y viennent pour des raisons marketing. Ensuite, ils se prennent au jeu. Ici à Correns, ils pratiquent de manière basique, ils sont au minimum du cahier des charges parce que c’est leur première année, mais il y a une réelle motivation derrière. D’ailleurs, c’est la première fois en France que 100 % des viticulteurs d’une coopérative cultivent en bio et en biodynamie, et sur
170 hectares, ce n’est pas rien.