Entraîneurs pour qui la retraite peut attendre
Eux, la retraite, avec ou sans réforme, à 62, 64 ans ou plus, ils n’en connaissent pas les détails ou s’y intéressent de loin. Nourris à la passion du ballon, ces techniciens ont l’art de viellir comme le bon vin, à l’image du Bordelais d’adoption qu’est Jean-Louis Gasset. Il a fallu que ce dernier franchisse le cap des balais pour que plus personne ne mette en doute ses qualités d’entraîneur numéro . Des ex-entraîneurs de nos clubs azuréens, Claudio Ranieri, Gernot Rohr ou Lucien Favre, continuent aussi de porter la bonne parole avec un succès durable.
1.Gernot Rohr (Nigeria)
A 67 ans, l’ancien manager puis entraîneur de l’OGC Nice (2001-05), à la tête du Nigeria depuis 2016, a prolongé en juin son contrat de deux ans (jusqu’en 2022) avec les Super Eagles. Gernot Rohr devrait ainsi battre un record enviable : de toute l’histoire - mouvementée - de l’équipe du Nigeria, aucun sélectionneur n’a pour l’instant réussi à durer plus de cinq ans (Clemens Westerhof, de 89 à 94, a tenu le plus longtemps). Il faut dire que le technicien franco-allemand, ancien joueur puis entraîneur de Bordeaux, amoureux du bassin d’Arcachon comme de la Côte d’Azur, a su imprimer un style séduisant à sa sélection. Nul n’a oublié la Coupe du monde 2018 des Super Egales : à quatre minutes près face à l’Argentine de Messi (12), le Nigeria se qualifiait et affrontait les Bleus de Deschamps en 1/8es de finale ! L’an dernier, Gernot Rohr a amené les Super Eagles à la 3e place de la CAN, échouant en demi-finale dans le temps additionnel face à l’Algérie (1-2), futur vainqueur de l’épreuve. « Ma sélection est une très jeune équipe, la mission n’est pas encore terminée, nous voulons la poursuivre et d’abord nous qualifier pour la CAN » ,a souligné Rohr, branché sur une quatrième victoire en Coupe d’Afrique du Nigeria après les succès de 1980, 1994 et 2013. Le Nigeria de Samuel Kalu est en tête de son groupe de qualification pour l’édition 2021 après avoir remporté ses deux premiers matches contre le Bénin (2e) et le Lesotho (3e), à la fin de l’année passée. Père de famille comblé, l’homme à la célèbre Trabant (qu’il conserve chez des amis à Nice) a trouvé en Afrique (il a commencé avec le Gabon en 2010) un terrain d’expression qui lui va comme un gant. Capable de s’adapter comme d’imposer ses méthodes, proche de ses joueurs et habile polyglotte, Gernot Rohr a gagné ses galons de sorcier africain. La potion jeunesse lui appartient !
2. Jean-Louis Gasset (Bordeaux)
Comme Rohr, Jean-Louis Gasset est un ancien Girondin : il fut, de 2007 à 2010, l’adjoint de Laurent Blanc sur les terres du Haillan. Longtemps, Jean-Louis Gasset a semblé devoir terminer sa carrière dans la peau de l’éternel adjoint. Celui dont le travail de l’ombre, disait-on, permettait à tout un club de trouver la lumière. Jean-Louis Gasset n’a jamais été un grand fan des micros, des conférences de presse où chaque parole est décortiquée. Lui préfère l’intimité du terrain. Il excelle aussi bien dans la tactique que la gestion des égos. Saint-Etienne peut lui dire merci, et vice-versa. Il sauva les Verts de la descente en 2018 puis les conduira à l’Europe, après avoir sauvé Montpellier en 2017, sa première expérience de coach principal à 63 ans. Après la 4e place homérique des Verts (2019), il se disait usé, avait évoqué la retraite pour se rapprocher de sa famille. Mais le virus était trop fort et la proposition girondine de succéder à Paulo Sousa l’a fait replonger cet été. Gasset respire le foot comme personne.
À bientôt 67 ans (en décembre), l’anomalie du temps passé est qu’il soit encore un jeune entraîneur en chef.
3. Marcelo Bielsa (Leeds United)
’’El Loco’’, à 65 ans, met encore le turbo. Adulé du temps de l’OM, que dire de son statut à Leeds, où il vient de replacer le club historique des’’Peacocks’’ en Premier League, 16 ans après l’avoir quittée. Fidèle à son personnage, Marcelo Bielsa laisse encore planer le mystère sur son intention de prolonger à Leeds, car l’Argentin veut une équipe capable de bien figurer. Si l’on peut se permettre un conseil aux dirigeants de Leeds : surtout, pas la moindre entourloupe avec le nouveau contrat. Sinon, gare au coup de théâtre de la démission, Marseille n’a pas oublié.
4. Roy Hodgson (Crystal Palace)
Le célèbre super vétéran britannique (73 ans depuis le 9 août) ne garde pas un grand souvenir de l’Allianz Riviera. Dans la foulée d’une défaite face à l’Islande en 1/8es de finale de l’Euro 2016 à Nice, il annonçait sa démission du poste de sélectionneur de l’Angleterre... Il n’empêche, l’ancien modeste défenseur de 5e division anglaise a su rebondir à Crystal Palace, le club qui n’avait pas voulu de lui lorsqu’il avait 19 ans. Avec Mamadou Sakho sous ses ordres, Hogdson a réussi depuis son pari. Crystal Palace et son stade au charme’’so bristish’’, inauguré en 1924, sont toujours membres de la Premier League. Les Eagles de Selhurst Park ont encore les griffes acérées. Et mister Hodgson paraît toujours prendre un plaisir intact dans ses fonctions.
5. Claudio Ranieri (Sampdoria)
Lors de son départ de Monaco en 2014 (il avait fini 2e), Claudio Ranieri avait invité de sa poche toute la presse pour un déjeuner à La Turbie. Du jamais vu. Ce n’est pas la raison pour laquelle le Romain figure dans ce classement. A 68 ans, il a encore sauvé la Sampdoria de la relégation, redressant une situation mal embarquée sous Di Francesco. Sa carrière est immense, son art de faire cohabiter humour et rigueur imbattable. Il peut continuer sa route tranquille : depuis Leicester 2016 (champion), plus personne ne peut dire de lui qu’il est le Poulidor des coachs.