LE VASTAREL EST-IL DOPANT ?
Pour construire la défense de Zelimkhan Khadjiev, Maître Jacques Boedels s’est appuyé sur les connaissances de JeanPierre de Mondenard. Ce médecin du sport de 77 ans est considéré comme un spécialiste indépendant du dopage. Il se définit lui-même comme étant « contre le dopage et la lutte antidopage telle qu’elle est pratiquée. » Ancien médecin sur le Tour de France de 1973 à 1975 et sur d’autres courses cyclistes, le Nîmois s’est longuement intéressé au Vastarel et à son principe actif, la trimétazidine (TMZ).
L’AMA n’aurait aucune étude fiable
« Le Vastarel a été commercialisé en 1964 pour la première fois (par le laboratoire Servier, NDLR). Il est encore utilisé pour les gens qui ont des insuffisances coronariennes ou des angines de poitrine (1), pose le Gardois en préambule. Son principe actif, la trimétazidine, se retrouve sur la liste des produits dopants le 1er janvier 2014, soit 50 ans plus tard. Je suis un scientifique et là, pour moi, il y a un problème. Je n’avais jamais vu le Vastarel cité dans des affaires de dopage de grande amplitude. Or, les premiers qui connaissent les produits dopants, ce sont les sportifs. »
De Mondenard décide d’enquêter sur le médicament, et encore davantage quand Maître Boedels le sollicite pour l’aider à défendre Khadjiev. Après avoir consulté Servier, des moteurs de recherche scientifique, des laboratoires antidopage et l’International Testing Agency (ITA) (2), il jure qu’aucune étude n’aurait été réalisée pour prouver le caractère dopant de la TMZ. « J’ai reçu trois études, indique de Mondenard. Aucune ne montre un effet sur la performance. La première vient de Pologne. Elle démontre uniquement la capacité à détecter la trimétazidine dans les urines. Idem pour la deuxième, qui s’appuie sur un cas positif pour 2300 contrôles aux Jeux de Sotchi en 2014. Quant à la troisième, elle démontre une amélioration de l’oxygénation du myocarde chez des personnes victimes d’infarctus. Or, un gain de 1 ou 3 % sur le coeur d’une personne malade est nul sur celui d’un sportif. » Contactée, l’Agence mondiale antidopage n’a pas répondu à nos sollicitations. « On pourra vous rétorquer que la TMZ est dopante par assimilation, parce qu’elle est proche du meldonium, connu pour être dopant, achève le Nîmois. Sauf que vous pouvez avoir des molécules
quasi identiques mais aux effets inverses ».
(1) En 2012, son utilisation en ophtalmologie (trouble de la vision) et par les ORL (vertiges, acouphènes) est restreinte. Ses effets sont considérés plus dangereux que bénéfiques. Depuis 2017, seuls les cardiologues peuvent le prescrire. (2) L’ITA est une agence indépendante qui réalise, entre autres missions, des contrôles pour les Fédérations sportives. La Fédération internationale de lutte lui a délégué son programme antidopage.