Un « pancréas artificiel » au service des diabétiques
Des scientifiques niçois découvrent un « interrupteur moléculaire » qui pourrait permettre de rendre cette tumeur au cerveau plus accessible aux traitements
Ils ont choisi de défier l’une des maladies les plus redoutables qui soient : le glioblastome (lire interview ci-dessous). Non pas en l’attaquant de face – tous ceux qui s’y sont essayés ont échoué – mais en utilisant ses propres ressources comme une arme retournée contre elle-même. « Ils », ce sont un groupe de scientifiques, associant des cliniciens, Fabien Almairac, neurochirurgien, et Fanny Burel Vandenbos, anatomopathologiste (CHU de Nice) et des chercheurs de l’institut de Biologie Valrose, à Nice : Laurent Turchi, ingénieur et Thierry Virolle directeur de recherche Inserm (1). À la base de leur projet, une observation : « Longtemps, on a appréhendé une tumeur comme la résultante d’une prolifération anarchique de cellules, relate l’équipe. Ce n’est pas tout à fait exact. Une tumeur compose un écosystème très organisé et hiérarchisé avec des cellules dotées de fonctions distinctes. Et sa gravité dépend tout particulièrement d’une souspopulation de cellules très agressives, possédant des propriétés de cellulessouches : elles sont capables d’autorenouvellement, de différenciation et surtout de résistance aux traitements conventionnels : radio et chimiothérapie. » Dans le cas des glioblastomes, ces cellules sont nommées cellules-souches de gliome (GSC) et ce sont elles qui sont « responsables de l’initiation et de la progression tumorale ainsi que des récidives, malheureusement systématiques pour cette pathologie. »
« Interrupteur moléculaire »
Mais, d’où proviennent ces GSC ? Quels liens existent entre ces cellules et les autres cellules tumorales (moins agressives) ? Sachant qu’il est très difficile de les éliminer en totalité en utilisant les thérapies conventionnelles, quelle autre stratégie envisager ? Pour répondre à ces questions, Laurent Turchi, ingénieur de recherches dans l’équipe de Thierry Virolle, a commencé il y a déjà 10 ans – avec le consentement des malades opérés pour un glioblastome dans le service de neurochirurgie du CHU de Nice – à mettre en culture ces pièces opératoires (incluant des cellules tumorales différenciées (CTD) et des cellules-souches). Et, en scrutant de près ces échantillons, l’équipe a découvert que des cellules tumorales différenciées étaient capables dans certaines conditions d’acquérir toutes les propriétés de GSC : « marqueurs de pluripotence, très forte prolifération clonale, résistance accrue aux drogues et capacité à infiltrer et proliférer dans un tissu cérébral hôte ex vivo et in vivo. » Les chercheurs vont alors essayer de décrypter les mécanismes en jeu dans cette conversion aux effets gravissimes pour le malade. « Nous avons mis en évidence un “interrupteur moléculaire” qui permet de déclencher cette conversion. » Un interrupteur contrôlant la plasticité des GSC et qui fonctionne dans les deux sens. « Si les cellules tumorales différenciées peuvent se transformer en cellules-souches cancéreuses très agressives, le chemin inverse est également possible. » Avec cette découverte majeure, publiée dans Cancer Research, c’est une stratégie thérapeutique totalement nouvelle qui peut être envisagée contre le glioblastome : amener la tumeur, en ciblant cet interrupteur moléculaire, à « se transformer » pour devenir moins agressive, plus indolente donc accessible aux traitements conventionnels.
La suite ? « En collaboration avec Maria Duca, de l’institut de chimie de Nice, nous avons déjà identifié – et breveté – une molécule capable d’agir sur cet interrupteur », annonce Thierry Virolle.
Si le chemin qui mène vers d’éventuels essais cliniques est encore long, c’est un morceau de ciel bleu que font enfin apparaître ces découvertes dans le tableau sombre de cette tumeur cérébrale redoutable, le glioblastome.