Un surveillant de Grasse s’enchaîne dans sa prison
Durant près de 7h30, un syndicaliste Force ouvrière pénitentiaire s’est enchaîné hier sur une grille de l’un des couloirs de passage de la maison d’arrêt. Un geste spectaculaire
Hier, en début d’aprèsmidi, la direction de la maison d’arrêt de Grasse a finalement réussi à trouver un double des clés pour détacher Hervé Segaud. Ce gardien, syndicaliste Force ouvrière pénitentiaire, s’était enchaîné vers 6 heures hier matin aux grilles intérieures de l’établissement. Ce geste spectaculaire, qui a duré près de 7 h 30, a permis au surveillant de médiatiser la lutte de ses camarades. Aux premières heures, Hervé Segaud s’était enchaîné à une des grilles de passage, peu avant la rotonde, le noeud de circulation de la prison. Il a utilisé des entraves de pieds, des chaînes à bracelets habituellement réservées aux détenus. Il a ainsi paralysé en partie les déplacements au sein de la maison d’arrêt. À son cou, le syndicaliste Force ouvrière portait un panneau: « Surveillant insulté, menacé, agressé, méprisé, muselé, sanctionné. Enchaîné mais fier et debout! » Ce geste rarissime a surpris et quelque peu embarrassé la direction. « Beaucoup de surveillants sont venus me voir pendant mon occupation. Ils m’ont apporté à manger, à boire, y compris des agents qui ne travaillent pas habituellement dans ce secteur-là », a commenté hier après-midi le syndicaliste.
Des syndicats divisés
Le gardien a été très sollicité par de nombreux médias, donnant même une interview radio alors qu’il était encore enchaîné. « Je fais cela pour qu’on parle de notre mouvement, de notre ras-lebol, de notre colère », a confié le surveillant à notre quotidien. « Les menaces de règlements de compte, de la part des détenus, sont quotidiennes. Dès qu’on a une altercation, un point de désaccord, ça commence par insultes, puis viennent les menaces et parfois les coups. »
Blocage à Nice
Ces dernières heures, les sanctions sont tombées, de la part du directeur de l’administration centrale pénitentiaire. Le but : faire fléchir le mouvement. Dans un courrier adressé aux directeurs de prison, que NiceMatin s’est procuré, Stéphane Bredin durcit le ton. Pour les grévistes, il tape d’abord au portefeuille : « Application systématique de la retenue du trentième décomptée à partir du 20 janvier. » Et exige, pour la journée du 24 janvier, de cinq jours d’exclusion temporaire (DR) avec sursis « pour toute cessation concertée du service ou acte collectif d’indiscipline caractérisée », à cinq jours ferme et dix avec sursis « pour les agents qui entraveraient l’accès des personnels de direction (...)». Des menaces qui n’ont pas impressionné tout le monde. La maison d’arrêt de Nice a de nouveau été bloquée hier matin, nécessitant une nouvelle fois l’intervention des forces de l’ordre. Hier soir, la base était très partagée sur les dernières propositions faites dans la journée par la ministre de la justice: 1100 emplois supplémentaires, des primes plus élevées, du matériel de sécurité et des quartiers « étanches » pour les détenus radicalisés. Les syndicats, très divisés, devaient se prononcer sur la poursuite, ou non, du mouvement. Hier soir, FO pénitentiaire et la CGT ne semblaient pas favorables à signer le projet d’accord. De son côté, Emmanuel Macron assurait la ministre de la Justice, Nicole Belloubet – en grande difficulté sur le dossier – de son entier soutien. Dans la soirée, la poursuite du mouvement de blocage était décidée. (Lire aussi en pages France)