Monaco-Matin

Fracture des Républicai­ns, an I

- THIERRY PRUDHON Reporter edito@nicematin.fr

« Le mot social n’est pas un gros mot. »

C’était il y a tout juste un an. Sans crier gare, Christian Estrosi harponnait François Fillon, venu tenir meeting à Nice. Ce jour-là, il balançait publiqueme­nt la bombe à fragmentat­ion qui allait signer l’acte de décès définitif de l’UMP, ce fourre-tout porté sur les fonts baptismaux par Jacques Chirac en , au nom du réalisme électoral. D’une phrase, quinze ans de mariage de raison, sans nuages excessifs, venaient de voler en éclats. A l’époque, nul ne pouvait accuser Christian Estrosi de macronisme avancé, sauf à le confondre avec Mme Irma : Benoît Hamon n’avait pas conquis ses galons de général en chef de La Belle Alliance populaire pour conduire le PS à la déroute ; beaucoup prédisaien­t toujours que la bulle Macron ne tarderait plus à éclater ; surtout,

Le Canard n’avait pas encore volé dans les plumes de François Fillon. Malgré un léger coup de mou, celui-ci toisait ses adversaire­s en madone des sondages. Sans doute même avait-il déjà son gouverneme­nt en tête… La « droitisati­on de la société » résonnait telle une berceuse balladurie­nne. La présidenti­elle était pliée. A droite cependant, le mal était déjà plus profond qu’on ne le percevait. L’humiliatio­n de Nicolas Sarkozy à la primaire laissait Les Républicai­ns sans chef. Fillon n’en était pas un. Dès lors, faute d’avoir su fédérer ses troupes et adoucir son projet, il a rouvert la boîte de Pandore où s’entassaien­t, cahin-caha, chicayas idéologiqu­es et rancoeurs intimes. Un an après l’amorce du pire désastre de son histoire, la droite ne s’est toujours pas relevée. Si Emmanuel Macron ne l’a pas pulvérisée, à l’inverse du PS, il l’a dispersée avec méthode. L’élection sans combat de Laurent Wauquiez à la tête de LR ne change, pour l’instant, rien à l’affaire. Le rebond sera compliqué, tant les issues sont escarpées. Par son approche pragmatiqu­e du monde du travail, le gouverneme­nt a coupé les vivres libéraux à l’opposition. Jean-Michel Blanquer, sans corriger sa copie d’une virgule, aurait été un parfait ministre de l’Education de Fillon. Et, sans vendre leur âme autant que perdre tout crédit, Les Républicai­ns ne pourront décemment s’acoquiner avec le FN, quelles que soient les tentations isolées. Reste donc à Laurent Wauquiez la voie restreinte d’un souveraini­sme soft et d’une sécurité exacerbée, les européenne­s de  n’étant pas, foncièreme­nt, l’échéance la plus propice à retisser les liens effilochés. Parce que l’électorat de droite ne s’est pas dissous dans le naufrage filloniste, parce que le syncrétism­e à marche forcée aura ses limites, Les Républicai­ns ont malgré tout un avenir. Même si, pour l’heure, le chemin qui y mène a l’étroitesse d’une calade du Vieux-Nice. Et ce n’est pas un gros mot.

« Le mal était déjà plus profond qu’on ne le percevait. »

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