Macron nettement en tête mais en perte de vitesse
Notre sondage BVA sur le second tour de la présidentielle donne une confortable avance au candidat centriste. Lequel suscite davantage un vote-réflexe contre le FN qu’une réelle adhésion
L’élection présidentielle est-elle d’ores et déjà pliée? Notre sondage BVA-Salesforce-Orange (1) vient plutôt confirmer ce sentiment, en créditant Emmanuel Macron d’une substantielle avance au second tour. Pour autant, l’écart s’est resserré par rapport à ceux qu’envisageaient les enquêtes effectuées avant le premier tour. Elles faisaient alors état d’un rapport de forces de 62 - 38, avec même une pointe à 65 - 35 en faveur du candidat centriste. A l’évidence, la brève polémique sur sa désinvolture au soir du premier tour, mais surtout la guérilla que lui a livrée Marine Le Pen à Amiens, au contact des ouvriers de Whirlpool, ont légèrement porté préjudice à Emmanuel Macron. C’est net à la lecture des intentions de vote des ouvriers, qui sont 66 % à vouloir voter Le Pen. Macron reste en revanche nettement en tête chez les cadres, à 75 % d’intentions de vote. Le fossé entre les deux candidats est aussi sociologique et cette élection contribue à réactiver une forme de lutte des classes.
Candidat rempart
Pour le candidat d’En marche !, la gageure n’apparaît a priori pas tant d’être élu que d’être élu largement, pour essayer d’asseoir dans la foulée une majorité parlementaire à ce jour improbable. La participation, annoncée plus faible qu’au premier tour, entre 73 et 78 %, pourrait ainsi lui faire du tort. On perçoit aussi qu’à l’image d’Alain Juppé lors de la primaire, Emmanuel Macron ne suscite pas encore une franche attirance. Il est, pour l’instant, d’abord perçu comme un rempart. 48 % des sondés seulement estiment qu’il incarne le renouveau, 39 % qu’il a l’étoffe d’un chef de l’Etat et 22 % qu’il est proche des gens. Si les jugements sont globalement moins bons encore pour Marine Le Pen, elle est en revanche perçue comme plus à l’écoute du peuple (à 33 %). De fait, le constat est clair : six Français sur dix iront voter dans huit jours pour faire barrage à Marine Le Pen, plutôt que par adhésion à Emmanuel Macron.
Les reports de voix
Quid des reports de voix des candidats battus ? Les électeurs de Jean-Luc Mélenchon voteront à 41 % Macron, 18 % Le Pen, 41 % s’abstiendront. Ceux de Benoît Hamon à 71 % Macron, 4 % Le Pen, 25 % s’abstiendront. Ceux de François Fillon à 41 % Macron, 26 % Le Pen, 33 % s’abstiendront. Ceux enfin de Nicolas Dupont-Aignan à 19 % Macron, 46 % Le Pen, 35 % s’abstenant. Les reports de voix des autres candidats n’ont pas été testés. On notera que la très forte opposition des deux adversaires sur ce sujet a fait surgir en force la thématique de l’Europe dans les motivations des votants, juste derrière le chômage et à égalité avec la sécurité. Un dernier pourcentage, en guise de résumé pour la route : 71 % des sondés se déclarent insatisfaits de l’affiche du second tour. Si Marine Le Pen y participe pour une bonne part, Emmanuel Macron doit y puiser matière à humilité. S’il est élu le 7 mai, le plus dur débutera pour lui. Il lui restera à convaincre, sans état de grâce annoncé.
1. Enquête réalisée par Internet du 26 au 28 avril, auprès d’un échantillon représentatif de 1 438 Français inscrits sur les listes électorales.