Cinq candidats pour un premier débat
Il a eu beau saisir le Conseil d’Etat et, samedi soir, quitter de façon impromptue le plateau du « 20 heures » de TF1 en signe de protestation, Nicolas Dupont-Aignan ne sera pas présent, aujourd’hui à 21 heures, lors du premier grand débat (hors primaires) de la campagne présidentielle. Car s’ils sont, au final, onze prétendants lancés dans la bataille présidentielle, ils ne seront que cinq à s’affronter sur le plateau : la chaîne a choisi de ne réunir que les « grands » candidats, favoris des sondages : Marine Le Pen, Emmanuel Macron, François Fillon, Benoît Hamon et Jean-Luc Mélenchon. Un moment qui pourrait s’avérer décisif dans la campagne : comme le souligne à l’envi – pour se rassurer – l’entourage de Benoît Hamon, à la peine dans les sondages, la moitié des électeurs déclarent en effet n’avoir pas définitivement arrêté leur choix.
Pour le camp Fillon, « il ne va rien se passer »
Un exercice que les candidats ont donc tous soigneusement préparé, mais qu’ils abordent avec des attentes et des stratégies très différentes. Alors que le candidat socialiste espère prolonger le pari réussi de son meeting à Bercy (lire en pages suivantes), Jean-Luc Mélenchon, qui a lui aussi fait une démonstration de force, samedi entre Bastille et République, se verrait bien en profiter pour doubler son rival, avec qui il est au coude-àcoude dans les sondages. Même si les deux hommes devraient relativement s’épargner. A droite, l’entourage de François Fillon a au contraire tenté de minimiser l’enjeu, en laissant entendre dans Le Journal du dimanche hier : «Il ne va rien se passer ou pas grandchose, vous allez être déçus… » Mais a quand même affûté ses arguments contre Emmanuel Macron et Marine Le Pen, qui sont à la fois au-dessus du candidat de la droite et du centre dans les intentions de vote, et les seuls candidats majeurs desquels ils peut espérer détourner des électeurs. Donné en première ou deuxième position selon les enquêtes d’opinion, Emmanuel Macron sera vraisemblablement dans la situation la plus inconfortable. D’abord car son positionnement centriste, qui se veut au-dessus des clivages partisans, constitue à la fois une force et une faiblesse : il attire des électeurs de presque tous les bords de l’échiquier politique... mais ils sont plus susceptibles de changer d’avis, selon la dynamique de campagne du candidat de leur camp politique « traditionnel », ou si Emmanuel Macron lui-même commet des impairs. Ensuite parce que ses adversaires, qui peuvent presque tous espérer « récupérer » ceux de leurs anciens électeurs qui soutiennent le leader d’« En marche ! », ont logiquement intérêt à concentrer leur attaques sur ce dernier.
L’inconnue Marine Le Pen
Reste l’inconnue Marine Le Pen. La présidente du Front national, dans une position également très favorable et qui a mené jusqu’ici une campagne beaucoup plus discrète que les autres, pourrait vouloir, sinon rentrer complètement les griffes, en tout cas mesurer ses coups et rester en retrait. Outre qu’elle peut en attendre un bénéfice d’image évident et que cela s’inscrirait dans sa ligne actuelle en matière de communication («Je ne veux pas diviser », soulignait-elle encore jeudi dernier face à nos lecteurs), elle aurait en effet tout intérêt à laisser ses rivaux s’écharper entre eux, et à en récolter les fruits. Mais elle pourrait aussi, si ses concurrents la rudoyaient, vouloir se poser une fois de plus en victime du « système », ce qui lui permettrait en outre d’attaquer, par effet miroir, Emmanuel Macron, qui constitue aujourd’hui pour elle la menace la plus sérieuse. 1. France 2, en revanche, a prévu le 20 avril (soit seulement trois jours avant le premier tour) une émission avec tous les candidats retenus par le Conseil constitutionnel.