Monaco-Matin

 milliard pour la villa Les Cèdres

La villa Les Cèdres, à Saint-Jean-Cap-Ferrat est en vente. Ancienne demeure du roi des Belges et propriété de la famille Marnier-Lapostolle, elle pourrait se négocier autour du milliard d’euros

- GUILLAUME BERTOLINO guibertoli­no@nicematin.fr

Un milliard d’euros! Plus fort que la tour Antilia de Mumbai en Inde. Plus encore que la villa « bunga bunga » Certosa de Berlusconi en Sardaigne. Plus chère que la villa Leopolda, sa « voisine » villefranc­hoise. La villa Les Cèdres, à l’entrée de la presqu’île de Saint-JeanCap-Ferrat est en vente. Et le montant qui se murmure à propos de la transactio­n à de quoi donner le tournis avec ses dix chiffres. C’est en tout cas ce que vaudrait ce coin de paradis selon des observateu­rs très bien renseignés. Lorsque la villa est construite en 1830, c’est plus sur une lande à la maigre végétation que sur un Eden à la luxuriance démesurée. Elle est tout d’abord acquise par DavidDésir­é Pollonais en 1850, quand ce fils d’une riche famille niçoise de vendeurs de tissus devint maire de Villefranc­he-sur-Mer.

L’autre villa du roi des Belges

Mais la villa Les Cèdres est surtout connue pour avoir été l’ancienne propriété de Leopold II. Transformé­e dans le goût italien par l’architecte niçois Biasini, elle vit passer des personnage­s illustres comme le duc d’Edimbourg, le prince Bonaparte, la reine Victoria ou le général Grant. C’est le souverain des Belges qui fit remanier la propriété par son architecte Messiah. Il fit creuser l’étang de 50 mètres de long et confia le jardin aux architecte­s Vacherot et Peto. Mais pins, eucalyptus et cèdres resteront longtemps les seules plantation­s du domaine. On dit qu’il acheta la propriété qui donne sur la rade pour y héberger son amie, Blanche Zélie Joséphine Delacroix, appelée le plus souvent Caroline Delacroix. Lui la surnommait

« Très-Belle ». Il l’avait rencontré en 1899, alors qu’elle n’avait que 16 ans, lui 64. Il fit de « TrèsBelle » la baronne de Vaughan et son épouse morganatiq­ue quand il sentit la fin arriver. Au décès du roi, en 1909, la villa tomba dans la « donation royale ». Pendant la Grande Guerre, elle est même transformé­e en hôpital pour soldats belges victimes de gaz asphyxiant. En 1924, la villa fut achetée par Alexandre Marnier-Lapostolle, propriétai­re de la liqueur « Grand Marnier » et du vignoble du Château de Sancerre. L’homme d’affaires avait

« craqué » pour cette somptueuse propriété qui compte une dizaine de chambres, une salle des fêtes, un jardin d’hiver, une écurie et une concierger­ie. Elle dispose également d’une piscine et surtout d’un parc de 14 hectares. Et c’est le fils d’Alexandre Marnier-Lapostolle, Julien, membre du muséum d’Histoire naturelle, qui va donner toute son ampleur au domaine et en faire, à partir des années trente, l’un des plus importants jardins exotiques privés du monde. Comptant pas moins de 25 serres et des dizaines d’essences tropicales extrêmemen­t

rares. Aujourd’hui, sur les 14 hectares de la propriété, 10 sont aménagés en jardin et pas moins de 27 serres abritent les spécimens tropicaux: 13000 à 14000 espèces sont ainsi livrées aux bons soins d’une armada de jardiniers. La société Marnier-Lapostolle ayant repris le flambeau dans une action de mécénat pour la conservati­on scientifiq­ue et la recherche botanique de cet ensemble unique en France. Mais voilà. En ce début d’année, c’est le géant de la liqueur italien, le groupe Campari, qui a « hérité » de la villa en même temps qu’il rachetait la société Marnier-Lapostolle afin de conquérir les ÉtatsUnis où la liqueur française triomphe. Campari a très tôt fait savoir qu’il ne souhaitait pas conserver une maison qui avait déjà aiguisé l’appétit de Bill Gates. C’était à la fin des années 2000, lorsque Paul Allen, l’autre actionnair­e majoritair­e de Microsoft, avait jeté son dévolu sur une villa voisine. L’affaire ne s’était finalement pas conclue. Mais aujourd’hui, d’autres prétendant­s seraient de nouveau en course. On parle, comme d’habitude, de famille du Golfe arabique et de magnats russes.

Le double de la Leopolda ?

On pensait avoir atteint tous les records lorsque la Leopolda, sise sur les hauteurs de Villefranc­he-surMer, avait trouvé acquéreur en 2008. Quand le milliardai­re russe, Mikhaïl Prokhorov s’était engagé pour la somme record (à l’époque !) de 370 millions d’euros, plus 19,5 millions pour les meubles. L’affaire avait finalement capoté suite à la crise des subprimes. Elle s’était même terminée devant la justice lorsque le magnat russe avait été condamné dans un litige au droit de rétractati­on. Il avait dû verser 39 millions d’euros à la propriétai­re, Lilly Safra, la veuve du célèbre banquier libanais. 390 millions pour une propriété au parc deux fois plus petit. « Moins bien située » que la villa des Cèdres au coeur de SaintJean… Pour certains, il est évident que la villa devrait se négocier autour du milliard d’euros plutôt qu’aux environs de 300 ou 400 millions comme on peut le lire par ailleurs.

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(Photo Jean-Sébastien Gino-Antomarchi) C’est derrière ce portail et cette dépendance, en apparence sans luxe ostentatoi­re, que se cache la villa Les Cèdres, présumée la plus chère du monde.

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