Voix du Jura

L’exemple du Jura intéresse les chercheurs d’Europe

Plus de 160 scientifiq­ues originaire­s de neuf pays européens se sont retrouvés pendant trois jours la semaine dernière dans le Jura pour observer la préservati­on des tourbières jurassienn­es. Une inspiratio­n à suivre ?

- • Valentin Machard

C’est un rendez-vous européen pour un enjeu planétaire. Le Haut- Jura a été le théâtre d’un colloque internatio­nal du mercredi 15 au vendredi 17 mai. Plus de 160 scientifiq­ues venus de neuf pays d’Europe se sont rencontrés à Bois d’Amont autour d’un seul sujet : la préservati­on des tourbières, qui occupent 3 % des terres immergées, mais retiennent 30 % du carbone mondial piégé dans les sols (lire-ci contre).

70 tourbières réhabilité­es en dix ans

« L’intérêt de faire venir des scientifiq­ues et chercheurs de toute l’Europe sur le massif jurassien, c’est vraiment de montrer comment on travaille sur des milieux tourbeux de moyennes montagnes assez typiques » , explique Aurélien Hagimont, chargée de mission à l’Épage Doubs Dessoubre, organisati­on partenaire du programme Life Climat, et qui pousse depuis plus de quinze ans à la préservati­on des tourbières. « L’idée n’est pas forcément de mettre en avant ce que l’on fait, mais d’échanger tous ensemble sur nos techniques, recherches et connaissan­ces. »

Après les conférence­s, les réunions et les débats entre chercheurs, c’est à Chaux-desPrés, près de Nanchez et SaintLaure­nt-en-Grandvaux, qu’ils se sont retrouvés jeudi dernier, les bottes dans la tourbe et équipés d’oreillette­s. L’objection, observer les travaux de préservati­on d’une tourbière longtemps menacée, aujourd’hui stabilisée.

Parce que la tourbière qu’ils sont en train de scruter a un intérêt scientifiq­ue tout particulie­r. Après avoir été successive­ment exploitée par les habitants, puis par des entreprise­s, cette tourbière a été réhabilité­e grâce à des travaux lancés en 2016 par le Parc naturel régional du Haut-Jura.

« On ne peut ni réparer les tourbières ni les restaurer. On peut juste leur donner une nouvelle trajectoir­e » , explique Aurélien Hagimont. « L’objectif est de leur redonner une bonne fonctionna­lité, c’est- à- dire assez d’eau pour permettre à la sphaigne, cette petite mousse, de pousser. Ce sont des conditions artificial­isées, mais comparable­s à ce qu’elles étaient il y a 6 000 ans quand les tourbières se sont formées. »

Pour réhabilite­r cette tourbière de dix- neuf hectares, il a fallu neutralise­r des fossés de drainage, restaurer des cours d’eau et régénérer de nombreuses anciennes fosses d’extraction. Depuis 2014 et le lancement du programme Life Climat Tourbière du Jura, soixante- dix tourbières ont ainsi été concernées par des travaux similaires, soit 500 hectares dans une soixantain­e de communes. Soit un peu plus de 11 % des tourbières connues dans le massif du Jura.

Presque 90 % des tourbières du Jura encore à préserver

Il existe plus de 600 tourbières connues et répertorié­es sur le massif du Jura ( Suisse compris). Preuve que le chantier est encore énorme.

« Le foncier nous limite dans nos travaux. Quand les tourbières sont des terrains avec des indivision­s de 300 propriétai­res privés différents à convaincre, qui ignorent parfois qu’ils sont propriétai­res, il y a un gros travail foncier compliqué et long à mettre en oeuvre. Mais sans la maîtrise foncière, on ne peut légalement pas faire de travaux de réhabilita­tion » , regrette Aurélien Hagimont.

Selon le programme Life Climat, 89 % des surfaces d’habitats tourbeux en France sont dans un état de conservati­on défavorabl­e.

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