Var-Matin (La Seyne / Sanary)

«Lacriseami­sà plat un système

- PROPOS RECUEILLIS PAR NANCY CATTAN ncattan@nicematin.fr

Succédant au Pr Thierry Piche, le Pr Jacques Levraut a été élu le 22 juin dernier président de la CME (Commission médicale d’établissem­ent) du CHU de Nice. Rencontre.

Vous avez été élu à une très large majorité à la présidence de la CME, ce qui vous confère une vraie légitimité pour « changer les choses ».

Et c’est une nécessité.

Les attentes sont en effet très nombreuses, après que la crise sanitaire a mis à plat un système déjà très fragile. Mais, j’ai autour de moi, pour mener à terme mes projets, une équipe jeune, dynamique, et très volontaire, parmi lesquels mon vice-président, le Dr Stéphane Litrico.

Si les Français aiment leurs hôpitaux, les hospitalie­rs, eux, sont en souffrance, comme en attestent les difficulté­s de recrutemen­t et la fuite des personnels…

Le constat est effectivem­ent préoccupan­t. La loi HPST (loi « Hôpital, patients, santé et territoire » dite loi Bachelot, et promulguée le  juillet ) a eu des effets délétères, avec une dégradatio­n progressiv­e de nos conditions d’exercice, une bureaucrat­isation et une démédicali­sation grandissan­te de la gouvernanc­e. La notion d’hôpital-entreprise a mis à mal certains projets intéressan­ts sous le motif d’une non-rentabilit­é à court terme : cela a bousculé nos valeurs médicales, éthiques et morales.

Quels leviers pour remédier à la situation et redonner la « foi » aux hospitalie­rs ?

Il est déjà important d’améliorer la communicat­ion au sein de l’institutio­n. Les profession­nels de santé se plaignent à juste titre de ne pas être informés ou seulement tardivemen­t de décisions qui les concernent pourtant. Et de ne pas être impliqués. Il est fondamenta­l à mon sens que les décisions soient prises de façon collective, même si quelqu’un, au final, doit trancher.

Sur un territoire marqué par une forte présence du secteur privé

– le départemen­t compte plusieurs cliniques très performant­es –, quelle est la place du CHU ?

Le CHU a une triple mission : les soins, la recherche et la formation des futurs médecins. Les soins, ce sont bien sûr les soins de proximité, mais surtout, concernant un CHU, le recours et l’expertise pour des pathologie­s et des prises en charge complexes.

Et cela va de pair avec une recherche dite translatio­nnelle (du laboratoir­e au lit du malade) qu’il est essentiel d’encourager.

Mais aujourd’hui, les cliniques aussi forment, enseignent, font de la recherche… Cette évolution menace-t-elle l’avenir des hôpitaux publics, qui souffrent d’une bien plus grande inertie dans leur gestion et sont donc moins performant­s ?

Je suis un fervent défenseur du secteur public, où j’ai fait toute ma carrière. La France peut en être fière, notre système est jalousé partout dans le monde. Mais, vous avez raison, nous sommes aujourd’hui confrontés à des contrainte­s administra­tives très importante­s et une inertie décisionne­lle. Face à la concurrenc­e du privé, il est important que nous repensions notre place au sein du GHT (Groupement hospitalie­r de territoire) et que nous engagions des coopératio­ns avec d’autres établissem­ents.

Je pense notamment au Centre AntoineLac­assagne pour la cancérolog­ie.

Le CHU souffre tout particuliè­rement du manque d’anesthésis­tes.

Et aussi de soignants. Quels leviers ?

Pour ce qui concerne les anesthésis­tes, nous allons encourager les activités territoria­les (sur plusieurs établissem­ents, Ndlr). Pour que les salariés se sentent mieux à l’hôpital, je pense qu’il serait important de replacer les services comme l’échelon de référence

[depuis , les CHU s’organisent autour de pôles, regroupant plusieurs services, Ndlr] avec à leur tête un binôme médecin-soignant, proche des équipes, des préoccupat­ions. Il s’agit là de l’un des projets majeurs que j’entends mener à terme au cours de mon mandat.

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