Var-Matin (La Seyne / Sanary)

L’abominable doute

- de THIERRY PRUDHON Reporter edito@nicematin.fr

La médiatisat­ion, ce vertige de l’époque, est à l’image de la langue du fabuliste Ésope. La meilleure et la pire des choses. On m’excusera ce prisme masculin, de papa surtout qui peine à concevoir l’inimaginab­le souillure : je ne peux m’empêcher de compatir au calvaire de Richard Berry, s’il est étranger à l’ignominie dont il se trouve accusé. Il y a matière à devenir fou furieux d’être ainsi réduit à une belle ordure, en sachant que la tache et la suspicion resteront, quoi qu’il advienne, indélébile­s. L’affaire Iacono a montré que toute accusation ne valait pas culpabilit­é. L’honneur tardivemen­t retrouvé du maire de Vence ne tint pourtant qu’à un fil, le revirement in extremis de son petit-fils. Dans ce genre d’épreuve, la notoriété vaut double peine. La broyeuse met à nu devant  millions de voyeurs.

Il faut, cependant, se rendre à l’évidence. La société se bonifie aussi par la mise en lumière blafarde de ses travers. La diminution des féminicide­s, la réduction des comporteme­nts déviants, doivent beaucoup au matraquage de la déferlante MeToo. Malgré d’irritants excès, elle a libéré la parole des femmes et ceinturé ceux qui se croyaient tout permis. Et intouchabl­es. Les règlements de comptes, tout aussi nauséabond­s, sont sans doute un dommage collatéral inévitable du bannisseme­nt progressif des rapports scabreux. La multiplica­tion de récits sordides doit-elle, pour autant, pousser la justice à allonger le délai de prescripti­on ? Pourquoi pas. Même si, s’agissant de huis clos familiaux et de déviances d’alcôve, dont la réalité reste la plupart du temps improuvabl­e, la parole de l’un butera toujours sur celle de l’autre. C’est bien ce qui déstabilis­e tant. Richard Berry a la bouille d’un bon mec. Il a aussi donné un rein à sa soeur. Ça ne dit malheureus­ement rien de sa sexualité. Dans ce monde saturé de faux-semblants, on a néanmoins une farouche envie de croire que l’effet loupe des médias ne fait pas de tous les hommes des pervers.

« L’effet loupe des médias ne fait pas de tous les hommes des pervers. »

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