« Un projet industriel, c’est ans »
L’entreprise familiale créée en à Carros, dirigée par Dominique Crassous développe et fabrique des pièces composites thermodurcissables à partir de deux procédés industriels qui rendent le composite technique de haute qualité. Ce que Dominique Crassous peut dire de la réindustrialisation de la France ? « Nous sommes en retard. D’abord, parce qu’un projet industriel, c’est sept ans, de la conception à la production. Et le temps politique est autre. Nous sommes donc soumis à un risque de changement majeur [de réglementation, ndlr] pendant la réalisation d’un projet. Au Portugal, les dirigeants font en sorte que vous ne soyez pas contraints par des normes fluctuantes. Pour que l’industrie monte haut, il faut des bases solides et en France ce sont plutôt des sables mouvants. Avec le code
H-Prec développe et produit notamment des jantes innovantes. du travail, c’est pareil. Sans compter le problème culturel à percevoir l’apprentissage comme voie de garage. Ailleurs, c’est une force. En Allemagne, ils ont créé des “auto-écoles” de l’industrie et quand on en sort, on sait conduire. Ici, on les fait passer de la théorie aux heures du Mans... Pour arrêter l’hémorragie de la délocalisation, il va falloir casser les habitudes. Un pays compétitif a une industrie forte, basée sur sa valeur ajoutée. Force est de constater qu’en France, ce n’est pas l’industrie. » À la question : « Pensez-vous que la France ait la capacité de se réindustrialiser ? » La réponse d’Hervé Livon, pdg de Chromalu, TPE spécialisée dans le traitement de tout type de matériaux (La Seyne-sur-Mer) est un vaste rire... jaune. « Je dirais plutôt que l’État fait tout pour tuer l’industrie. Il y a une réglementation drastique qui nous submerge. Tous les jours, ça change. Tous les jours, c’est de plus en plus compliqué. Et nous, industriels, nous sommes toujours vus comme des pollueurs, des entreprises dont il faut se méfier. Des dangers potentiels. Alors que chaque pollution créée est parfaitement traitée, maîtrisée. Cela fait partie du métier... quand il est bien fait. »
Demain, j’arrête
Détrompez-vous, Hervé Livon aime ce qu’il fait. Enfin, aimait. Là, il raccroche. Cet ingénieur de formation, à la tête de huit sociétés dont trois unités de production réparties entre La Seynesur-Mer (83), Vitrolles (13) et Carros (06) vend tout. « Je n’en peux plus. On a beau aller voir la DREAL [Direction régionale de l’Environnement, de l’Aménagement et du Logement] pour dénoncer les ateliers sauvages qui ne respectent aucune réglementation et nous font perdre du chiffre d’affaires, et il ne se passe rien. On vient taper sur nous. Depuis l’incident de Lubrizol, c’est pire. Les politiques ne mettent pas les mains dans le cambouis pour comprendre nos contraintes, pour simplifier le code du travail, pour former correctement les jeunes. Ils ne se rendent même pas compte de la richesse et du potentiel de la filière. Alors je ne vois pas comment le miracle de la réindustrialisation pourrait se produire. »
Se rendre compte de notre richesse
Pourtant, il le dit avec fougue : « L’industrie, la technologie, c’est ce qui fait avancer le monde. Mais posons-nous les bonnes questions. Déjà, pourquoi est-ce que tout est fabriqué à l’étranger ? » Avec sa dizaine de salariés, ils travaillent avec des fournisseurs locaux et 90 % de ses clients sont régionaux. Il n’existe que deux sociétés aux activités similaires en Paca « Parce que les autres ont jeté l’éponge. Découragés. Rendez-vous compte qu’en sortie de station, l’eau utilisée pour mon activité, que je dois traiter, doit contenir moins de chlore que celle que me fournit la Ville ! »Ila quasiment investi 100 K€ par an dans ses ateliers depuis qu’il a repris la société mais là, il dit stop. Nous retrouverons peut-être Hervé Livon en aquaponie, qui sait ?