Législatives : nouveau programme moins radical chez Les Républicains
Oublié, le projet économique porté par François Fillon pendant la campagne présidentielle. Le nouveau programme économique des Républicains met l’accent sur le « pouvoir d’achat » et notamment celui des « classes moyennes », a martelé leur nouveau chef de file pour les législatives, François Baroin, lors de sa présentation à la presse, hier matin, au siège du parti, dans le 15e arrondissement de Paris. Concrètement, qu’est-ce qui change ? Le choc de compétitivité voulu par le candidat déchu est sérieusement revu à la baisse. La baisse d’impôts et de charges en faveur des entreprises est ainsi réduite de 35 à 23 milliards d’euros, dont 10 milliards pour la diminution de l’impôt sur les sociétés de 33 à 25 %, identique à celle voulue par Emmanuel Macron. Et pour cause, pour retrouver les grâces de l’électorat populaire et tenter d’obtenir une majorité absolue à l’Assemblée, Les Républicains alliés à l’UDI ont remisé au placard la TVA sociale de deux points de François Fillon (de 20 à 22 %), qui devait rapporter de l’ordre de 12 à 13 milliards d’euros à l’État. Adieu, donc, la TVA sociale destinée à favoriser les exportations tout en « taxant les importations ». Les Républicains se contentent désormais d’une baisse d’impôts sur « la production » (sur le chiffre d’affaires) et de charges patronales sur l’ensemble de l’éventail des salaires pour 13 milliards d’euros, quand le nouveau président de la République entend concentrer ses réductions sur les bas salaires uniquement. Les deux projets prévoient désormais la transformation du CICE (Crédit d’impôt pour la compétitivité et l’emploi) en allégement pérenne de cotisations pour les entreprises, dès 2018.
Suppression de l’ISF
Avec la suppression totale de l’ISF, maintenue dans le nouveau programme, Les Républicains portent donc à 28 milliards l’effort réalisé en faveur du système productif, contre 40 milliards pour François Fillon. Emmanuel Macron, lui, se limite à exonérer d’ISF le patrimoine immobilier. Les deux programmes prévoient en revanche une baisse de l’imposition des revenus du capital (intérêts, dividendes, etc.) grâce à un prélèvement à taux unique de 30 %. Le coup de pouce au pouvoir d’achat devrait également prendre la forme d’une baisse de 10 % de l’impôt sur le revenu pour toutes les tranches. Pour le reste, Les Républicains reprennent le programme de François Fillon avec l’augmentation des « petites retraites » de 300 euros par an et celles des pensions de réversion. « En face de cela, Emmanuel Macron augmente massivement les impôts. C’est une augmentation cachée, avec une hausse de la CSG de plus de 20 milliards d’euros payés directement par les retraités, les fonctionnaires et les professions libérales », a attaqué Éric Woerth, qui a travaillé à la synthèse de toutes les sensibilités des Républicains. Si le nouveau programme économique de la droite et du centre fait donc une croix sur la hausse de la TVA, reste la question de son financement. Car Les Républicains ont aussi calé sur la réduction du nombre de fonctionnaires. Les suppressions de postes passent à 300 000 à la fin du quinquennat grâce à l’augmentation du temps de travail (avec une certaine compensation salariale), contre 500 000 pour François Fillon et 120000 pour Emmanuel Macron.
La réforme des retraites
La grande différence dans les programmes de la droite et de La République en marche reste donc la réforme des retraites. La première veut repousser l’âge légal de départ de 62 à 65 ans (avec maintien de 67 ans pour le taux plein), le second préfère construire un système unique de retraite par points, calé sur le modèle suédois, sans toucher à l’âge de départ. Mais rien qui ne soit rédhibitoire. En cas de majorité relative à l’Assemblée pour La République en marche, nombreux sont les ténors des Républicains qui se sont dits prêts, ce mercredi, à travailler avec le président de la République. Le jeu cruel de la politique C’est un de ces paradoxes pardonnent pas ses camarades dont la vie politique a le du PS, y compris secret. Sur le fond, Emmanuel ceux d’entre eux qui Macron et Manuel étaient ses fidèles. Valls sont plus Ensuite, il s’est heurté, proches qu’il n’y paraît. de l’autre coté, à une sévère Beaucoup de points communs fin de non-recevoir en effet entre le aux airs d’humiliation : président de la République le mouvement du Président proclamé et l’ancien n’est pas, a dit JeanPaul Premier ministre de François Delevoye, Hollande, et notamment responsable des désignations lorsque les deux aux législatives, un hommes, alors dans le « appareil de recyclage même gouvernement, ». ont affronté ensemble la Ce n’est pas seulement difficulté parce de que, faire notoirement, sauter les blocages les de deux la société hommes ont française entre ou eux un de réformer contentieux le code personnel du travail. L’un et l’autre que l’investiture de se sont alors heurtés aux La République en marche mêmes syndicats, l’un et est refusée, pour l’heure, l’autre ont essuyé les à Manuel Valls. Mais coups portés par les aussi parce qu’elle est frondeurs socialistes. contraire à la stratégie Ils ont paré aussi ceux que s’est fixée Emmanuel que leur assénait l’opposition, Macron : le renouvellement qui prônait elle de la classe politique. aussi quelques-unes de ces réformes, à condition C’est encore qu’aux yeux qu’elles ne soient pas faites du nouveau Président, par un gouvernement l’équilibre entre la gauche de François Hollande. et la droite est indispensable Il y a pourtant une différence pour majeure entre ces recomposer la vie politique deux hommes qui souhaitaient comme il l’entend, l’un et l’autre autour d’une position réunir les progressistes centrale. de tous les partis. Pour cette raison, après L’un, aujourd’hui, après avoir ouvert les bras il y a avoir rompu avec François plusieurs semaines déjà Hollande, est élu à Jean-Yves le Drian, ancien président de la République, ministre socialiste l’autre s’est laissé de la Défense, Emmanuel prendre dans les filets de Macron n’a pas intérêt à Matignon, a démissionné ce que vienne à lui une trop tard et mal, pour trop grande partie de socialistes être finalement éliminé en rupture de par la primaire socialiste. ban avec leur parti, ce En une phrase comme en qui ferait peser d’un seul cent, l’un a gagné, l’autre côté le plateau de la balance. a perdu. Alors, Manuel Valls devait-il, Et Manuel Valls, de ce pour les élections point de vue, est un législatives qui viennent, poids lourd, qui peut rester dans un Parti socialiste peut-être décourager qu’il avait luimême, d’autres, juppéistes ou depuis centristes, de participer longtemps, déclaré en à la nouvelle majorité soins intensifs, ou tenter présidentielle. de rejoindre le camp En L’ancien Premier ministre Marche? En choisissant la aura-t-il, dans son fief deuxième option, il a d’Evry, en juin prochain, fait, semble-t-il, une un candidat socialiste et double fausse manoeuvre. un candidat En Marche ! D’abord, il s’est contre lui. coupé de ses racines politiques, La politique est décidemment ce que ne lui un jeu cruel.