Aux assises, un accusé à la dérive permanente
La cour d’assises du Var s’est intéressée hier au passé de Boubekeur Bahloul, jugé pour tentatives de meurtre le 15 juillet 2018 à Toulon. Le verdict sera rendu ce mercredi.
Boubekeur Bahloul le dit lui-même : il est « possessif et nerveux ». Une nervosité dont tout le monde, dans son entourage, fait part. Que ce soit sa propre mère, la mère de sa fille qu’il a visée avec un fusil de chasse le 15 juillet 2018 à Toulon (lire nos éditions précédentes) ou l’ex-compagne chez qui il vivait au moment des faits. Pour l’expert psychiatre, les mots sont différents mais le sens est le même : Boubekeur Bahloul « manque de maturité » et souffre d’une « mauvaise capacité d’introspection ».
Addiction au cannabis
La « dérive permanente » de l’accusé, dixit le président Patrick Véron, a été au coeur des débats hier devant la cour d’assises du Var. Cumulant les condamnations pénales – notamment pour violences conjugales et même sur ascendant alors qu’il n’était que mineur - Boubekeur Bahloul empile aussi les incidents en détention. Douze en quatre ans d’emprisonnement provisoire, débouchant sur au moins cinq passages en quartier disciplinaire. Téléphone, cannabis, bagarre… «Je suis addictif (sic) au cannabis,
s’excuse presque l’accusé. J’en ai besoin pour dormir… » – « Fumer dix joints par jour ne peut pas rester sans conséquence dans la vie active » lui répond à distance l’expert psychiatre.
Un comportement à risque, qui trouve sans nul doute racine dans une enfance difficile, auprès tout d’abord d’un père violent puis d’une mère «démissionnaire » et en dépression suite au décès de son propre père. « J’étais ado et je vivais mal le fait de la voir prendre tous ces médicaments,
explique l’intéressé. J’étais énervé, tout le temps. Oui, je l’ai bousculée une fois… »
Contraint, selon lui, d’assumer les besoins financiers de la fratrie, il se lance dans le trafic de stupéfiants et met très tôt un terme à sa scolarité. Une plongée en apnée dans la délinquance que même la relation avec Élodie B., puis la naissance de leur fille, ne freineront pas. « Boubekeur Bahloul ne veut endosser aucune responsabilité,
estime pour sa part le psychologue Cyril Rolando. Il est dans un déni de réalité. » Auquel s’ajouterait un manque d’empathie qui obligerait l’autre «à se plier à ses besoins ».
« J’ai vraiment fait n’importe quoi… »
Son salut viendrait-il de sa reconnaissance des faits reprochés ? Après trois ans de dénégation, il a enfin avoué être l’auteur du coup de feu qui a occasionné une infirmité permanente à la concubine de l’oncle de sa compagne de l’époque. Alors guidé, comme souvent, par ses émotions.
« Je ne sais pas ce qui m’a pris. » – « Vous vouliez tirer sur Élodie ? » lui demande le président. – « Même pas ! C’est la mère de ma fille. Même si on s’insultait, je ne voulais pas la tuer. J’ai vraiment fait n’importe quoi… » Un premier pas vers une prise de responsabilité indispensable selon les experts pour mettre fin à la dérive permanente de l’accusé. Dans le cas contraire, tous s’attendent à un risque élevé de récidive. C’est avec cette incertitude que les avocats des parties civiles, Mes Constance Brisou, Audrey Camuso et Lucas Mas prendront la parole ce mercredi matin. Suivront les réquisitions de l’avocate générale, Karine Blank, et la plaidoirie de la défense, assurée par Me Régis Durand. Le verdict sera rendu dans l’après-midi.