Budget : le bras de fer s’engage à l’Assemblée
Les députés ont entamé hier l’examen du projet de budget 2023, que le gouvernement se prépare à faire adopter sans vote en cas de « blocages ».
En l’absence de majorité absolue pour les macronistes au Palais Bourbon, le ministre de l’Économie Bruno Le Maire a appelé hier à « discuter intensément et sereinement cette semaine » afin d’éviter une « bataille rangée» . Le locataire de Bercy a insisté sur la « protection » des Français face à l’inflation. Il a aussi défendu la poursuite de la « politique de l’offre » ,parla baisse des « impôts de production » des entreprises, dans un long développement sur les dangers que fait peser la flambée des prix de l’énergie sur l’industrie française. Dans un hémicycle pas comble, Bruno Le Maire s’est tourné sans les nommer vers les députés de droite LR, leur suggérant de « rester fidèles à leurs convictions, plutôt que de faire bloc avec la Nupes ou le Rassemblement national ».
Composer avec le « bouclier tarifaire »
Il a reproché aux oppositions l’adoption au total en commission de « plus de 7 milliards d’euros de dépenses supplémentaires ».
Avec plus de 3 000 amendements pour la séance sur le premier volet du budget dédié aux recettes, son collègue des Comptes publics, Gabriel Attal, a pointé un risque de « blocage » et d’ «embolie » :« Nous ne pouvons accepter que le débat s’enlise », a-t-il prévenu. Dans une ambiance parfois agitée, les députés ont repoussé d’entrée deux motions de rejet déposées par LFI. Les élus LR s’y sont opposés, pour « aller au bout des débats », selon Véronique Louwagie.
À l’extrême droite, Marine Le Pen a revendiqué une « opposition constructive », tout en reprochant d’emblée au gouvernement de « subir l’inflation », dans une « atmosphère de fin de règne ». Avant de s’atteler au projet de loi de finances lui-même, l’Assemblée nationale se penche sur la trajectoire budgétaire 2023-2027. Ce texte de programmation a été rejeté la semaine dernière en commission, au grand dam du gouvernement, qui redoute des conséquences pour les versements de fonds européens à la France.
Les députés commenceront au mieux aujourd’hui à s’attaquer aux amendements du PLF, qui comprend notamment un « bouclier tarifaire » de 45 milliards d’euros face à l’explosion des prix de l’énergie. Trop dispendieux pour la droite, « austéritaire » pour la gauche, « soumis » à Bruxelles selon le RN : les oppositions ont exclu de soutenir ce budget 2023. Et les « dialogues de Bercy », organisés en septembre par le gouvernement avec des députés de tous bords, n’y ont rien changé.
Article 49.3 : « On avisera...»
Le recours à l’article 49.3 de la Constitution semble donc inéluctable. À la main de l’exécutif, cet outil permet de faire passer un texte sans vote, à moins qu’une motion de censure ne soit adoptée. Le président de la commission des Finances, l’Insoumis Éric Coquerel, a demandé « solennellement au gouvernement de ne pas mettre en oeuvre le 49.3 » car « le débat doit avoir lieu ».
Il dénonce « la plus grande austérité de la Ve République » - la coalition de gauche Nupes appelle à une « marche contre la vie chère » ce dimanche à Paris.
« Nous sommes dans une posture de dialogue », a assuré la Première ministre Élisabeth Borne, hier. Mais « s’il doit y avoir des blocages (...), on avisera » quant à un 49.3. Le cap fixé est de contenir le déficit public à 5 % du PIB, malgré le « bouclier tarifaire », une augmentation des enseignants ou la création de plus de 10 000 postes de fonctionnaires, dont 3 000 policiers et gendarmes.