Me Jean-Claude Guidicelli : « Il fallait changer trois sondes pour éviter la catastrophe »
« Le crash était inéluctable, il était aux portes de l’avion », fustige Me Jean-Claude Guidicelli. « Tout est clair depuis le début : le fait générateur, c’est les sondes Pitot. Les pilotes ont manqué de repères à cause du givrage des sondes. » Le pénaliste toulonnais, aux intérêts de Carlos Amado dont la fille trentenaire était hôtesse de l’air à bord de l’Airbus A330, fait observer que les défaillances de ces sondes étaient connues au moins depuis 2008.
Ces dispositifs avaient une fâcheuse tendance à givrer, notamment après un certain nombre d’heures de vols, engendrant des incohérences dans les informations de vol. Ces sondes avaient été remplacées dans les flottes d’autres compagnies aériennes.
« Des circonstances très aggravantes »
« Techniquement, c’était un jeu d’enfant de changer ces sondes à deux mille euros pièce. D’ailleurs cela a été fait par la suite. On a mis la sécurité de côté pour des considérations financières » , insiste Me Guidicelli. Selon cette argumentation, six mille euros auraient suffi à éviter le drame du 1er juin 2009. « C’est scandaleux et terrifiant, il n’y a que le fric qui compte. »
« Il y a aussi un aspect “cocorico” », ajoute l’avocat de M. Amado en référence au choix (permis par la réglementation en vigueur) qui avait été fait de conserver des sondes Pitot fabriquées par Thales – autre fleuron de l’industrie tricolore – plutôt que de leur préférer celles du concurrent américain Goodrich. « Ces circonstances sont très, très aggravantes. On n’est pas dans l’aléa, c’était un transport sacrificiel. Il suffisait de changer les sondes ou de clouer les avions au sol », répète JeanClaude Guidicelli.
« Une bataille d’experts depuis 10 ans »
Tout le reste relève de « discussions byzantines », anticipe-t-il alors que les avocats de la défense devraient soulever des questions de forme et s’efforceront de minimiser la responsabilité des mis en cause dans la chaîne de circonstances qui a mené à la catastrophe.
« On va faire le procès des pilotes qui sont morts, c’est facile. Mais si on avait mis à leur disposition un matériel qui est fiable, et si on avait écouté les pilotes qui réclamaient le changement de ces sondes... Aujourd’hui et depuis plus de dix ans, on nous impose une bataille d’experts et un pingpong entre Airbus et Air France, sur un mode “c’est pas moi, c’est l’autre” .»