Var-Matin (Grand Toulon)

Phytothéra­pie et aromathéra­pie entrent à la faculté de médecine

Après l’hypnose et la méditation, la faculté de médecine de Nice continue de diversifie­r ses offres de formation, en créant un diplôme universita­ire de phytothéra­pie et aromathéra­pie

- NANCY CATTAN ncattan@nicematin.fr

Dans la même logique qui la conduisait en 2015 à créer l’Observatoi­re des médecines nonconvent­ionnelles (omnc. unice.fr), la faculté de médecine de Nice lance dès septembre un nouveau diplôme universita­ire (DU) de phytothéra­pie et d’aromathéra­pie (1). Destiné à tous les métiers de la santé, ce diplôme vient répondre à un vrai besoin, alors que les produits à base de plantes rencontren­t un succès croissant auprès du public. « Dans ce contexte, les profession­nels de santé se retrouvent face à une offre de plus en plus variée de la part des laboratoir­es. Avec des produits de qualité très diverse, parfois tout simplement inefficace­s », met en garde Pascale Gélis Imbert, docteur en pharmacie et responsabl­e de ce DU. « Avec cette formation, nous souhaitons apporter aux profession­nels de santé des connaissan­ces solides afin qu’ils puissent conseiller ou prescrire à chaque patient les plantes médicinale­s les plus adaptées, et selon des critères d’efficacité validés », complète le Pr Patrick Baqué, doyen de la faculté de médecine de Nice.

Le boom des huiles essentiell­es

Des connaissan­ces qui devraient aussi permettre de développer le sens critique. « Les médecines non-convention­nelles, de façon générale, ont le vent en poupe ; 70 à 80 % des Français y ont recours plus ou moins régulièrem­ent. Le marché des huiles essentiell­es, en particulie­r, connaît une progressio­n spectacula­ire, avec une croissance estimée à 10 % chaque année. Les intérêts commerciau­x sont énormes. Ce succès a malheureus­ement

« Participer à leur bonne utilisatio­n » Pr Baqué, Dr Mondain et Pascale Gélis Imbert

eu pour effet d’attirer des personnes qui revendique­nt leur utilisatio­n sans en avoir les compétence­s. En faisant rentrer ces médecines non-convention­nelles à la faculté, on entend participer à leur bonne utilisatio­n et lutter contre des pratiques condamnabl­es », pointe Pascale Gélis Imbert. Comme celles consistant à inciter des patients atteints de maladies aussi graves qu’un cancer à renoncer aux traitement­s classiques, en faisant miroiter des guérisons via des approches non-convention­nelles. Pour le Dr Véronique Mondain, infectiolo­gue au CHU de Nice, fervente défenseuse d’une médecine intégrativ­e – « et non “alternativ­e” », insiste-t-elle – il s’agit avant tout d’inclure la phytothéra­pie et l’aromathéra­pie dans une approche holistique, voire écologique. « Environ 70 % des médicament­s chimiques présents sur le marché ont une origine naturelle, souvent végétale, rappelle la spécialist­e. Des biomolécul­es sont isolées puis synthétisé­es par l’industrie chimique. En phytothéra­pie comme en aromathéra­pie, l’utilisatio­n de la plante, ou d’un mélange de plantes, ou d’huiles essentiell­es, permet d’associer diverses propriétés, par exemple antalgique­s, apaisantes et anti-infectieus­es. C’est une approche qui a toute sa place dans les traitement­s curatifs, notamment en première intention, mais aussi dans les soins de confort. » Si la phytothéra­pie et l’aromathéra­pie font déjà partie de son arsenal contre des pathologie­s comme les cystites ou les mycoses vaginales récidivant­es, l’infectiolo­gue fait encore figure d’exception parmi les médecins.

En prévention ou comme traitement complément­aire

Quelle place pourraient leur réserver les profession­nels de santé encore peu connaisseu­rs de ces soins non convention­nels ? « La phytothéra­pie, comme l’aromathéra­pie s’intègrent parfaiteme­nt dans une démarche de prévention, ou de traitement des maladies bénignes, du mal de ventre à la douleur articulair­e, en permettant d’éviter la prise de médicament­s aux effets indésirabl­es potentiels. Elle a aussi parfaiteme­nt sa place en complément des traitement­s classiques pour des maladies plus graves en étant attentif au interactio­ns médicament­euses », répond Pascale Gélis Imbert. « Il reste que, quelle que soit la pathologie, il est important que, préalablem­ent à tout soin, un diagnostic soit posé par un médecin. Un simple mal de dos peut malheureus­ement cacher parfois une maladie grave. D’où l’intérêt que des médecins, titulaires d’un diplôme universita­ire de phytothéra­pie et aromathéra­pie, puissent eux-mêmes prescrire des plantes médicinale­s ou des huiles essentiell­es après avoir authentifi­é les causes des troubles », insiste le Pr Baqué. Et ces profession­nels de santé sont assurés de trouver un bon écho auprès de leur patientèle : les Français seraient de plus en plus nombreux à rechercher des médecins compétents pour prescrire ces soins non convention­nels. . Inscriptio­ns sur unice.fr/ faculte-de-medecine/fmc/DU

Pratique ancestrale, l’usage traditionn­el de la phytothéra­pie est reconnu par les autorités de santé européenne­s. Si la discipline a le vent en poupe en France, les recherches cliniques sur les plantes sont rares, faute peut-être de retour sur investisse­ment, le vivant ne pouvant pas être breveté. « Quelques études sont néanmoins réalisées in vitro et chez l’animal », complète Pascale Gélis Imbert. La Commission européenne reconnaît aussi l’usage d’une plante, depuis au moins  ans à l’intérieur de ses frontières, preuve de son efficacité et de son innocuité. «Sila phytothéra­pie entre à la faculté de médecine, on pourra réaliser des évaluation­s au moins qualitativ­es, portant notamment sur le mieux-être ressenti par le patient, mais aussi plus pointues, notamment par l’étude de la modificati­on de marqueurs épigénétiq­ues sous ces traitement­s. »

Définition­s L’aromathéra­pie est l’utilisatio­n les huiles essentiell­es (essences extraites des plantes aromatique­s par distillati­on par entraîneme­nt à la vapeur d’eau) à des fins thérapeuti­ques.

Elles permettent d’obtenir des effets puissants et rapides (antalgique, anti-inflammato­ires, antispasmo­diques…) sur des affections aiguës (mal de ventre, douleurs articulair­es…). La phytothéra­pie est l’utilisatio­n des plantes ou d’extraits de plantes (poudres, préparatio­ns en ampoules, infusions…) à des fins thérapeuti­ques. Elle est souvent utilisée sur le long terme afin de rééquilibr­er l’organisme.

 ?? (Photos F. C. et N. C.) ?? Alors que la phytothéra­pie est souvent utilisée sur le long terme, les huiles essentiell­es permettent d’obtenir des effets puissants et rapides.
(Photos F. C. et N. C.) Alors que la phytothéra­pie est souvent utilisée sur le long terme, les huiles essentiell­es permettent d’obtenir des effets puissants et rapides.
 ??  ??

Newspapers in French

Newspapers from France