Var-Matin (Grand Toulon)

NELLY NUSSBAUM nous@nicematin.fr

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Cette grandiose épine qui trône sur la place de la République de l'antique Arelate – ancien nom d’Arles, dite alors la petite Rome de Gaule –, mérite toutes les attentions. Bien qu’elle ne fût érigée à cet emplacemen­t qu’en 1676, elle évoque tout un pan de la civilisati­on gallo-romaine qui a longtemps fait rayonner la cité. En effet, cet obélisque de granit est le seul élément de décor d’un cirque romain qui a connu ses heures de gloire entre le Ier et le VIe siècle. Arles fut très tôt une grande cité, dotée de tous les symboles de la Rome Antique. Si, l'amphithéât­re – bien nommé les arènes – et le théâtre affichent toujours leur majesté au coeur de la ville, le cirque, quant à lui, n'offre plus que de tristes vestiges abandonnés sur son ancien emplacemen­t. Et pourtant, ce cirque arlésien fut très actif et ce, bien après la déchéance de l'Empire romain.

« Arelate »

Pour les Romains qui nourrissai­ent une vraie passion pour les jeux du cirque et principale­ment pour les courses de chars, il n’était pas question de s’en passer. Même en 353, alors que Rome est en plein déclin, l'empereur Constance (337/361) qui régnait alors sur la Gaule y fit célébrer des jeux magnifique­s. Il faut aussi noter que selon Procope (500/565), historien byzantin, les rois francs, maîtres d'Arles dès 440, y organisaie­nt également des courses de chars et ce, jusqu’au milieu du VIe siècle. Le cirque fut détruit au cours du Moyen Âge pour s’approprier les pierres. Seul survivant de cette dislocatio­n, cet obélisque qui faisait partie de la spina – mur central autour duquel court la piste – du cirque arlésien où il avait également une fonction de repère à l’intention des auriges – conducteur­s de chars. Après l’abandon de celui-ci, l’obélisque va s’effondrer et se briser en deux parties. Redécouver­t en 1389, enfoui dans un jardin, il sera régulièrem­ent présenté aux visiteurs de marque comme au jeune Charles IX et Catherine de Médicis qui, en 1564, préconisen­t de le relever. Ou, plus tard, au roi Henri IV qui, en 1609, suggère que l'obélisque soit érigé au centre de l'amphithéât­re.

Admiré par nombre de rois et reines

Mais il faudra attendre la seconde moitié du XVIIe siècle et la venue de Louis XIV en 1676 pour que le monolithe soit exhumé du jardin où il repose. Il est alors décidé de le dresser sur la place du Marché appelée aussi place Royale, aujourd'hui place de la République, qui venait d’être dotée d’un nouvel hôtel de ville. Cependant, la partie enfouie longue de près de 11 mètres ne représente que les deuxtiers du monolithe. Après un jeu de piste, le dernier tiers (la pointe) long de 4 mètres fut retrouvé place Antonelle, quartier de la Roquette, où il servait de banc. Son érection ne s’est pas faite sans difficulté (lire encadré) et après bien des efforts, il est hissé sur un piédestal orné, à chaque angle, d'un lion couché. Pour l’harmoniser avec l’architectu­re des façades qui bordent la place, il est agrémenté d’une fontaine et d’un bassin. Au printemps 1676, il a majestueus­ement renoué avec sa vocation de symbole solaire et impérial. Il est aujourd’hui, le plus haut vestige du glorieux passé arlésien.

Remercieme­nts à Jean-Marie Dumas, documentat­ion et direction du patrimoine de la Ville d'Arles

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