Il n’a pas pas le bac, mais forme les futurs bacheliers
Aujourd’hui proviseur adjoint dans un lycée professionnel de Cannes, ce Toulonnais revient sur son itinéraire professionnel pour le moins atypique. De quoi inspirer les jeunes générations
Les élèves du lycée professionnel Hutinel de Cannes ne se doutent pas que les personnes qui les encadrent ont eu, elles aussi, durant leur parcours, autant de difficultés et de déconvenues, que de belles surprises. Pour ces lycéens, un proviseur ou son adjoint sont d’anciens bons élèves qui ont suivi une voie toute tracée. Impossible dans ce cas d’envisager que leur proviseur adjoint, Didier Sandrini, n’a pas son bac. Ou qu’il aurait pu, à un moment de sa vie, mal tourner. Pourtant, ce petit-fils de Toscans (arrivés à Toulon au début du XXe siècle) n’a pas suivi un cursus d’élève ordinaire. «Ce n’est pas que j’étais mauvais en classe. En fait, j’étais plutôt bon. Mais je voulais faire de l’informatique et nous n’avions pas les moyens. »
CAP en poche, il travaille aux chantiers de La Seyne
Alors son caractère un peu turbulent, la menuiserie du grandpère et du père où il travaillait de temps en temps avec la famille l’ont porté (dans un premier temps seulement, vous allez voir…) jusqu’à une seconde et un CAP de tourneur. « Après cela, j’ai eu l’occasion d’entrer aux chantiers de La Seyne-sur-Mer. Ça marchait bien, tellement que je suis monté au bureau d’études… Jusqu’au jour où un ingénieur a croisé mon chemin et m’a dit que je n’avais rien à faire là, que je prenais la place de certaines personnes diplômées qui attendaient depuis au moins 20 ans. » On a redescendu Didier Sandrini aux ateliers. «À cette époque, j’étais un peu turbulent… » Des courses de voiture la nuit, des quartiers toulonnais où il se sentait à l’aise : « J’aurais vraiment pu mal tourner… Heureusement qu’il y avait ma famille : ma mère et ma soeur, notamment, m’ont poussé à ce moment-là, à m’engager dans la Marine. » Là aussi il découvre de nouveaux domaines (boîte noire, instruments de bord, etc) avec beaucoup d’intérêt… Et c’est à cette époque également qu’il rencontre celle qui est toujours son épouse aujourd’hui : Anne-Marie. « Elle m’a donné deux filles (Lauriane et Diane) et a définitivement permis de donner une direction à ma vie...» Avec, toujours en priorité la connaissance. « J’ai toujours eu cette soif d’apprendre et ce désir de découvrir ce que je ne connaissais pas, ce qui était différent. » Un fort désir de transmission aussi, même dans sa phase de turbulences : « Je suis le président fondateur du club de tennis de table de Six-Fours. J’ai enseigné et encadré les équipes .»
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Maîtrise de droit à Assas
Pour la Marine en revanche, l’intérêt n’aura duré que quelques années. « De toute façon, lorsque je ne me sens plus bien quelque part, je m’en vais. » Didier Sandrini a alors trouvé un poste d’électricien à la SNCF. « Et ce faisant, je me suis mis à passer des concours. Je n’arrêtais pas…» Une capacité en droit, une licence et même une maîtrise à Assas (Paris), un DEA en droit public et un DU d’astrophysique ! Et puis, « moi qui disais que je n’irais jamais vers les établissements scolaires, je me suis mis à penser que peut-être, j’avais quelque chose à y apporter… ». Il essuie d’abord les plâtres à Aubervilliers : «L’établissement accueillait 42 nationalités différentes. » Il y invente un projet de découverte des cultures qui fonctionne bien et permet aux Serbes, aux Bosniaques ou aux Asiatiques, de se raconter et se rencontrer.
Honneur, honnêteté et justice
Puis le retour aux sources sonne. D’abord un poste à Draguignan. « Là encore j’ai pu mettre en place des projets. C’est comme ça que je fonctionne de toute façon : aux projets qui fédèrent et engagent enseignants et élèves. » Comme cela qu’il fonctionne aussi à Hutinel où il est arrivé l’an dernier. Aujourd’hui, à 53 ans le proviseur adjoint continue à monter des projets et reste fidèle à ses principes, ceux qui ont guidé sa vie et sa manière d’éduquer ses enfants : «L’honneur, l’honnêteté, la justice.» Avec une vraie empathie, une vraie capacité d’écoute de ces jeunes qu’il côtoie et conseille chaque jour. Pour lesquels il cherche coûte que coûte la meilleure solution. Et toujours, chevillée au corps, cette soif d’apprendre ce qu’il ne connaît pas, de découvrir l’inconnu d’intégrer de nouvelles connaissances. Des principes qu’il partage volontiers aussi avec les élèves. Car ils peuvent sans conteste se nourrir de ce parcours finalement proche à quelques égards du leur…
1. Il est aujourd’hui président de l’ATT Dracénie, club de tennis de table de Draguignan, président de la section handisport et membre du comité du Var de tennis de table.