Le retour des pieds-noirs Notre-Dame de Santa-Cruz
En bus, en voiture, ils ont fait la route à flanc de coteaux vers Notre-Dame de Santa-Cruz. Avec embouteillages et joyeuses embrassades à l’arrivée. Pour, ensuite, participer à la première messe, celle de l’Ascension, célébrée dans ce sanctuaire tout juste restauré. Et cela se voit ! Sur les façades tout en blanc. Sur l’esplanade et ses arcades refaites à neuf. Sur la statue de la Vierge, bien sûr, qui a retrouvé son blanc immaculé. Érigée en 1850 par les Français pour remercier Notre-Dame du Salut d’avoir stoppé une épidémie de choléra aux portes de la ville, la statue de la Vierge étincelle, entre ciel et mer, au-dessus d’Oran.
Quatre ans d’un chantier à millions d’euros
Ce sanctuaire vénéré des piedsnoirs est devenu l’emblème de la deuxième ville d’Algérie. « Un emblème restauré après quatre ans d’un chantier à 6 millions d’euros, dont la moitié a été financée par le gouvernement algérien», précise Mgr Jean-Paul Vesco, en accueillant les fidèles. Et l’évêque d’Oran de lister les mécènes de cette « oeuvre commune », dont la région Paca qui a financé un chantier école. Pour restaurer la chapelle « en formant la jeunesse oranaise au métier du bâtiment. C’est là un autre symbole de notre vivre ensemble que nous pratiquons au quotidien », ajoute-t-il. Avant de lancer : « Vous êtes de Nice ? Ah, c’est toute ma jeunesse… »
« Rien n’est banal, ici ! »
Celle passée auprès de ses grandsparents qu’il rejoignait à Nice pendant les grandes vacances. À 56 ans, Mgr Jean-Paul Vesco a derrière lui un parcours atypique. Lui, a fait son droit, à Lyon, sa ville natale, est devenu avocat d’affaires à Paris. Sept ans d’une « vocation » supplantée par une autre, incontournable : l’appel de Dieu. Ordonné prêtre à 39 ans, envoyé dans la foulée en Algérie, le voilà évêque d’Oran depuis cinq ans. Supervisant le chantier de NotreDame de Santa-Cruz. Puis célébrant cette messe de consécration du sanctuaire réhabilité par un office hors norme, multicolore, multilingue (arabe, français, espagnol, anglais), chanté, dansé, en version gospel. Une messe sacrément joyeuse à laquelle ont participé catholiques et musulmans qui ont suivi ce temps de partage dans une chapelle toute neuve. En blanc et rouge sarde (la couleur de la terre d’Oran). «Placée sur une ligne de fracture de l’histoire », unissant le passé et le présent pour regarder l’avenir, « cette chapelle toute simple n’a rien de banal » a souligné l’évêque dans son homélie. « Ce n’est pas banal non plus de restaurer une église alors que les croyants, dans leur immense majorité, ne sont pas chrétiens. » Une messe vibrante pour un vivre ensemble, loin du communautarisme, qui s’est achevée comme avant. Autour d’une gigantesque paella et des « mouna » partagées. En toute simplicité.