Greffe de trachée : une première mondiale réussie en France
Reconstruire une trachée : là où avait échoué un chirurgien italien dont les interventions manquées resteront l’un des scandales de l’histoire de la discipline (1), un autre, français, a réussi avec une technique différente. Présenté hier au congrès de la Société américaine à San Diego (États-Unis), le choix du Pr Emmanuel Martinod, de l’hôpital Avicenne, à Bobigny, a été de transformer par «l’ingénierie tissulaire» des aortes, plus grand canal sanguin du corps humain, en trachées, un conduit du système respiratoire. Les aortes avaient été prélevées sur des donneurs décédés, et cryogénisées à -80°C. Leur tissu a été greffé, en plus d’un «stent» (tuteur vasculaire), à la place d’une trachée préalablement retirée.
« Personne n’y croyait vraiment »
«On est allé de surprise en surprise. Dans un premier temps, on a vu une régénération d’épithélium, qui est la couche la plus superficielle », décrit-il «Et ensuite, l’aorte s’est transformée en trachée », se mettant d’elle-même à assurer les fonctions respiratoires. «Ce n’est pas de la magie » mais «personne ne croyait vraiment à tout ça ». Les opérations ont eu lieu à partir de 2009. Sur 20 patients sélectionnés, sept ont finalement bénéficié d’un traitement plus classique, sans greffe d’aorte. Sur les 13 autres, cinq se sont vu reconstruire une trachée, sept des bronches souches (les plus proches de la trachée), et le dernier une carène trachéale (bifurcation entre bronches gauche et droite). À chaque fois à partir d’une aorte. «Il n’y a eu aucune complication grave liée au greffon ou au stent [...] La grande majorité des patients respire aujourd’hui à l’aide du greffon qui s’est transformé. » 1. La technique du Pr Macchiarini consistait à cultiver en laboratoire, une trachée plastique « colonisée » par des cellules souches du patient. Mais sept des huit patients opérés entre 2011 et 2014 par ce chirurgien sont morts, et la trace du huitième a été perdue.