Var-Matin (Grand Toulon)

Aubagne : Marcel Pagnol y est né et n’a jamais oublié

- NELLY NUSSBAUM

Au départ, rien ne destinait Marcel Pagnol à écrire des oeuvres champêtres. Pourtant, en cette fin du XIXe siècle, sa ville natale, Aubagne, dotée d’un territoire fertile, est encore essentiell­ement agricole. La commune est même et, depuis des siècles, le marché maraîcher de toute la région. Malgré cet environnem­ent bucolique, le petit Marcel, aîné d’une fratrie de quatre enfants, est né dans une famille plutôt citadine. D’ailleurs, c’est en ville, à Marseille (à 20 kms d’Aubagne) que la famille part s’installer lorsque Joseph, son père instituteu­r, est muté pour la rentrée scolaire de 1897. Il va passer son enfance et sa jeunesse dans la cité phocéenne. En fait, c’est à 9 ans, pendant des vacances, que le futur écrivain-cinéaste-académicie­n découvre le Garlaban, un massif qui domine Aubagne et culmine à 714 mètres d’altitude. Il y rencontre Lili, un petit paysan, enfant du pays, qui va lui en révéler tous les secrets : la faune, la flore, les vies pastorale et paysanne. Dès lors, Marcel et Lili passeront toutes leurs vacances à gambader dans ce massif provençal, à poser des pièges à lapins, à explorer les grottes et s’égratigner les genoux. Ce vaste terrain de jeu, que l’écrivain n’oubliera jamais et ne quittera pas complèteme­nt, va devenir sa source d’inspiratio­n avant de devenir les décors naturels du cinéaste. C’est là, au milieu des pierres, qu’il va notamment reconstrui­re un village abandonné pour tourner Regain, ou encore faire évoluer Manon des Sources et Jean de Florette.

Sa maison natale perpétue sa mémoire

L’épopée Pagnol a débuté le 28 février 1895 à Aubagne, au 16 cours Barthélémy, dans un logement de fonction, mis à dispositio­n par le maire Joseph Laffont (de 1893 à 1905). Ce logis, qui a connu les premiers balbutieme­nts du père de la triologie Marius, Fanny et César, a été reconstitu­é par la municipali­té en 2003. Aussi, il semble que rien n’ait changé depuis l’époque Pagnol, sauf l’étage. En effet, l’appartemen­t où est né le petit Marcel se trouve au 3e étage, mais pour des raisons d’accessibil­ité, c’est au rezde-chaussée de l’immeuble que la Ville a réaménagé à l’identique les trois pièces qui racontent la vie de l’écrivain, ses souvenirs d’enfance, ses livres, ses films et même son arbre généalogiq­ue. Le mobilier, les bibelots et les accessoire­s personnels des Pagnol ainsi que des vêtements, comme un costume de marin - « l’habit du dimanche » des petits garçons de l’époque - laissent imaginer la vie que menait alors une famille de « petits notables ». Dans la cuisine, tout est authentiqu­e. Sur la pile (évier provençal) en pierre de Cassis, matériau symbolique présent dans nombre de demeures de Provence, pots, vases, vaisselle et ustensiles sont prêts à être utilisés … Émouvantes aussi, les deux bartavelle­s (perdrix royales) empaillées, suspendues audessus du fourneau. Ces deux oiseaux représente­nt les butins d’une partie de chasse où Joseph Pagnol, plus intellectu­el que chasseur, a réussi le « coup du roi », soit deux tirs, deux prises. Un « coup » exceptionn­el qui lui a valu les honneurs du village.

Photos inédites

Quoi qu’il en soit, ces deux trophées de chasse sont à l’origine de La gloire de mon père, qui, paru en 1957, est le premier ouvrage d’une trilogie relatant les jours heureux de l’enfant en Provence. Le livre débute par ces quelques lignes : « Je suis né à Aubagne, au pied du Garlaban couronné de chèvres, au temps des derniers chevriers ». Plus loin, la salle à manger résonne de rires d’enfants. En attendant le dîner, c’est sur la table familiale en chêne que Joseph corrige les copies de ses élèves et qu’Augustine rapièce les vêtements de ses hommes. Dans un coin de la pièce, s’étalent des bâtons de couleurs, premiers jeux du petit Marcel. Plus loin, dans la chambre à coucher, trône encore le berceau où Augustine berçait l’enfant prodige et qui a, sans doute, vu ses premiers pas. Partout sur les murs du logement s’affichent des photos inédites et des lettres manuscrite­s presque indiscrète­s qui dévoilent une facette intime du dramaturge. Une palette émouvante lorsque l’on sait que Pagnol a toujours été un grand pudique. Puis, pour terminer le voyage, une salle de « cinéma » installée dans une dépendance, projette en boucle des vidéos qui parlent de l’homme, de l’auteur, de ses oeuvres. Un film pour revivre en images la Provence de Pagnol. Sources : office de tourisme d’Aubagne. Remercieme­nts à Marie-Jeanne Granier, agent d’accueil de la maison de Marcel Pagnol. La maison natale de Marcel Pagnol, 16 cours Barthélemy, 13400 Aubagne. Ouverture du 1er novembre au 31 mars, du lundi au samedi de 9 h à 12h30 et de 14 h à 17h30. Ouverture du 1er avril au 31 octobre, du lundi au dimanche de 9 h 30 à 12 h 30 et de 14 h à 18 h.Tarif: 3€. Infos : 04.42.03.49.98.

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