Passionnées
Invitées par l’association Coexister, Sarah Zouak et Justine Devillaine présentaient, lundi soir, leur Women Sense Tour. Un documentaire qui entend changer le regard sur les femmes musulmanes
À l’occasion de la Journée des droits des femmes, rencontre avec des Varoises au mental d’acier, motivées par leurs rêves et leurs engagements.
Le projet de ce Women Sense Tour est né d’un « coup-de-poing » reçu à l’estomac. Il y a deux ans, lorsqu’elle prépare un mémoire sur les féministes musulmanes, Sarah Zouak, alors étudiante à l’Institut de relations internationales et stratégiques (IRIS), s’entend dire : « Tu décides, soit tu es féministe, soit tu es musulmane. » Pour la jeune femme, franco-marocaine et musulmane, le choc est violent. D’autant plus que cette injonction vient de sa directrice de mémoire… Deux ans après les faits, la jeune femme, aujourd’hui âgée de 26 ans, a encore du mal à réaliser. « En fait, à ma grande surprise, je me suis rendu compte que les femmes musulmanes pouvaient également être victimes auprès des milieux intellectuels. » Ainsi donc, l’islam serait un obstacle à l’émancipation des femmes. Les femmes musulmanes seraient forcément soumises, oppressées, sans aucun libre arbitre. Sarah Zouak ne se reconnaît absolument pas dans cette image relayée à l’envi par les médias occidentaux, et plus particulièrement français. Pire : « On parle de la femme musulmane comme d’un bloc homogène. Et surtout, on ne donne jamais la parole aux intéressées », dénonce la jeune femme. Pour « déconstruire ces préjugés », Sarah Zouak décide de montrer des modèles qu’on n’a pas l’habitude d’entendre. À la France où « on résume la femme musulmane soit à une petite racaille, soit à une femme de ménage», la jeune femme préfère partir, caméra à l’épaule, pour le Maroc, la Tunisie, la Turquie, l’Iran et l’Indonésie. Le projet Women Sense Tour in muslims countries prend forme. Justine Devillaine, connue sur les bancs de l’IRIS, s’y greffe. Les deux femmes réalisent vingt-cinq portraits de femmes musulmanes « toutes actrices de changement et engagées dans l’émancipation des femmes ». Les documentaires, primés par la Fondation de France, constituent « un bel outil pour aller à la rencontre des gens et aborder avec eux de façon bienveillante une thématique sensible ». Les deux jeunes femmes ont ainsi multiplié les projections dans la France entière et ont le sentiment de faire évoluer les choses favorablement. Mais elles ont décidé d’aller plus loin en co-fondant Lallab, à la fois une association et un magazine en ligne. «Un média, même », tente Justine. L’objectif reste inchangé: « Faire entendre les voix des femmes musulmanes qui sont au coeur d’oppressions racistes et sexistes. »