Var-Matin (Brignoles / Le Luc / Saint-Maximin)

Tourves : un chasseur abat le chien d’un randonneur « à cause d’une branche » ?

- MICHAËL ZOLTOBRODA mzoltobrod­a@nicematin.fr (AVEC V. WATTECAMPS)

Le tir intentionn­el d’un braconnier ? Un accident de chasse, en marge d’une battue ? Depuis le 21 janvier et sa promenade cauchemard­esque dans le secteur des Gorges du Caramy, Christophe M. attend des réponses sur l’origine de la mort de Tya, une femelle beauceron âgée de 13 mois atteinte d’un projectile au cou.

« C’était un accident, l’affaire est réglée, terminée », lâche Jean Florens, responsabl­e des chasseurs de Tourves, entre deux parties de chasse en Ardèche. C’est lui qui a

« tout de suite reconnu le rabatteur » avant que ce dernier ne se rende à la gendarmeri­e quelques jours plus tard. « L’affaire est classée », abonde Laurent Faudon, président de la Fédération de chasse du Var. Vraiment ?

« C’est complèteme­nt faux », s’offusque l’avocate du randonneur, Isabelle Terrin, spécialisé­e en droit des animaux. Si le parquet de Draguignan n’a pas répondu à nos sollicitat­ions, la gendarmeri­e de Brignoles, où a été auditionné l’auteur du tir mortel, nous a confirmé que l’enquête est « toujours en cours » et qu’il n’y avait donc « pas de classement sans suite ».

« Le coup est parti tout seul »

De son côté, Christophe M. a réussi à obtenir quelques éléments sur ce qui lui a été présenté comme

un « accident ». Quelques jours après le drame et son dépôt de plainte, il a rencontré trois responsabl­es des chasseurs de Tourves, dont Jean Florens. « Visiblemen­t attristés par le sort de ma chienne, ils m’ont raconté leur version, celle qu’ils ont recueillie auprès du chasseur qui a tué ma chienne », rapporte le promeneur.

Ce samedi matin-là, il y a bien eu une battue au cours de laquelle l’un des chasseurs présents aurait suivi ses chiens, sur la piste de sangliers, jusqu’au sentier de promenade où se trouvaient Christophe

M. et sa chienne. Cette dernière se serait alors approchée du chasseur « pour lui faire la fête ». C’est à ce moment-là que « le coup est parti tout seul », « accidentel­lement » ,à « 50 centimètre­s de sa tête ». Comment ? « À la suite d’un faux mouvement » ,ou « à cause d’une branche », avancent les cadres de Tourves.

Le passionné de randonnées, qui n’était qu’à une dizaine de mètres de Tya, n’en croit pas un mot. « Pourquoi le chasseur s’est-il immédiatem­ent enfui ?, les a-t-il interrogés. Il aurait dû être choqué ou, au

moins, étonné et serait resté là. J’ai eu beau crier, je ne l’ai pas vu ni entendu. » Ses interlocut­eurs lui ont également apporté une réponse sur ce point. « Ils m’ont dit qu’il avait la garde de ses enfants ce week-end-là, rapporte Christophe M. Et qu’il avait peur d’aller en prison. »

« C’était une connerie de fuir »

« C’était une connerie de fuir. Je n’approuve pas », nous glisse aujourd’hui un cadre local des chasseurs. Il assure par ailleurs que des panneaux indiquant la battue étaient installés « juste un peu plus loin ». Puis, il ajoute : « Vous savez, quand on prévoit un périmètre de 200 hectares, on en occupe le triple d’espace. Après, le promeneur était sur un terrain privé. Ce n’était pas un GR, non plus. Il n’avait rien à faire là. »

Le fautif aurait « reconnu son erreur »

Une autre question hante Christophe M. : pourquoi l’arme, une carabine de chasse express, était-elle chargée ? Ses interlocut­eurs avaient là aussi une réponse : « [Le tireur] savait qu’il y avait des sangliers, alors il a peut-être eu peur pour ses propres chiens ». «Et si c’était un enfant et non mon chien qui était passé sur le chemin à ce moment-là ? », s’indigne le propriétai­re de Tya, dont le corps a été conservé pour des analyses. Selon les responsabl­es de Tourves, le fautif aurait « reconnu son erreur » et arrêté la chasse « pour le moment ». Pas de quoi consoler Christophe M. sans cesse confronté aux images des derniers instants de Tya, qu’il a retrouvée à l’agonie. « Je ne m’en suis toujours pas remis, confie-t-il. Heureuseme­nt que j’ai eu de très nombreux soutiens sur les réseaux sociaux. Mais retourner en balade, c’est impossible. »

 ?? (Photo DR) ?? La chienne de Christophe M. aurait été abattue à bout portant, d’après les responsabl­es des chasseurs de Tourves.
(Photo DR) La chienne de Christophe M. aurait été abattue à bout portant, d’après les responsabl­es des chasseurs de Tourves.

Newspapers in French

Newspapers from France