Var-Matin (Brignoles / Le Luc / Saint-Maximin)

La semaine de Claude Weill

- Journalist­e, écrivain et chroniqueu­r TV edito@nicematin.fr

Dimanche

L’abstention, bien sûr.

Comme prévu. Pire que prévu.

Plus des deux tiers !

« Tu sais la différence entre une dictature et une démocratie ?, me demande un ami. –???

– En dictature, les gens rêveraient de pouvoir voter ; en démocratie, ils ne votent pas et se cauchemard­ent en dictature. »

Tout a été dit sur les raisons du phénomène. Défiance à l’égard du système politique ; fracture civique ; désintérêt pour l’institutio­n régionale, aggravé par l’absurde refonte de la carte des régions sous Hollande ; calendrier électoral surchargé

(une élection par an !), etc.

Plus, bien sûr, l’effet météo… Ajoutons la focalisati­on obsessionn­elle sur la présidenti­elle, qui finit par apparaître aux yeux de beaucoup comme la seule élection qui compte. La faute en revient pour partie aux politiques eux-mêmes et aux médias, qui « ne pensent qu’à ça » et se sont échinés (je mets de côté les quotidiens régionaux) à présenter ces régionales comme une sorte de sondage géant, le « tour de chauffe », voire le

« premier tour » de la présidenti­elle. Pas étonnant que tant d’électeurs désertent un scrutin dont le véritable enjeu – l’enjeu régional – a été escamoté.

Cette vision est d’autant plus sotte qu’avec moins d’un tiers de participat­ion, les enseigneme­nts à tirer des résultats sont fragiles, et leur valeur prédictive quasi nulle – n’en déplaise aux commentate­urs pressés. Car chacun, évidemment, retient les chiffres qui l’arrangent. Et vous entendrez les mêmes affirmer à cinq minutes d’écart que les résultats sont significat­ifs et prometteur­s dans les régions où ils ont gagné, et qu’ils ne veulent rien dire du tout dans les régions où ils ont pris une gifle, parce que

« vous savez, avec un tel taux d’abstention… ».

Se méfier de ceux qui parlent du peuple à sa place.

Lundi

Carole Delga, présidente PS de la région Occitanie, arrivée très largement en tête au premier tour, refuse tout accord en vue du second. « Mon projet, dit-elle, n’est pas compatible avec les propos de Jean-Luc Mélenchon. »

En Ile-de-France, le même PS s’empresse de fusionner avec les listes d’Europe Ecologie-Les Verts et de La France insoumise. À  %, on a des principes. À  %, on a des intérêts. Ainsi va la politique… Avec un brin de cynisme, on peut comprendre. De la à célébrer avec des hosannas l’avènement d’une « union de la gauche », comme le fait Olivier Faure ! À ce jour, l’union de la gauche est une chimère. Ilyaàpeu près autant de chances de la voir renaître de ses cendres d’ici à la présidenti­elle que d’apercevoir une licorne dans la cour de l’Élysée. Le Premier secrétaire du PS le sait pertinemme­nt, comme le savent tous ceux qui se plaisent à cultiver la nostalgie de l’unité nichée au coeur des militants. Rien n’est possible avec Mélenchon, qui ne conçoit l’unité qu’à son profit, et la social-démocratie qu’à genoux. Alors, aux grâces feintes et aux embrassade­s amnésiques, on peut préférer la rude franchise de la sénatrice socialiste Laurence Rossignol, qui se propose d’« aider les militants de La France insoumise à se débarrasse­r de Jean-Luc Mélenchon » ,car « il mène la gauche nulle part ».

Mardi

Un à qui les régionales ont donné des ailes, c’est Éric Zemmour.

Pour lui, la déconvenue du Rassemblem­ent national est une aubaine : l’occasion d’une opération de déstabilis­ation sur le thème « Le Pen n’est plus Le Pen » : « Il n’y a plus de différence aujourd’hui entre le discours de Marine Le Pen et celui d’Emmanuel Macron ou de Xavier Bertrand. »

Traduisons-le : le vrai patriote, c’est moi !

Cela peut-il aller jusqu’à une candidatur­e Zemmour à la présidenti­elle ? Il est tenté. On l’y pousse. Il se tâte.

Décision, dit-on, en septembre. D’ici là, son verbe est libre.

Et ses tribunes, innombrabl­es. Marine Le Pen commence às’enagacer: « Que les choses soient dites : être éditoriali­ste et se comporter comme un candidat à la présidenti­elle, ce n’est pas loyal. »

Sur le coup, difficile de lui donner tort.

Jeudi

Rudy Giuliani, l’avocat personnel de Donald Trump, est suspendu du barreau de New York en raison de ses propos « faux et trompeurs » sur l’élection présidenti­elle de . Aux États-Unis, on ne plaisante pas avec le mensonge.

L’Amérique n’a pas fini de purger le contentieu­x né de la folle tentative de coup de force contre la démocratie perpétré par les fidèles de l’ex-Président.

Près de  personnes ont déjà été arrêtées dans le cadre de la vaste enquête fédérale sur l’invasion du Capitole. Parallèlem­ent, les démocrates annoncent la création d’une commission d’enquête spéciale. Une formidable bataille politico-judiciaire se joue là, qui n’oppose pas seulement deux appareils politiques mais deux Amérique. Celle qui exige vérité et réparation, et celle qui, envers et contre tout, continue de vouer fidélité à « son » président Trump. A ce stade, n’était sa notoriété, l’humiliante sanction qui frappe l’ancien maire de New York n’est qu’une modeste entrée en matière.

Samedi

Les deux premiers malades contaminés par le variant Delta dans le Gers sont décédés.

Ils n’étaient pas vaccinés.

Comment mieux dire que le professeur de pharmacolo­gie Mathieu Molimard : « Mourir à  ans et  ans de la Covid parce qu’on a traîné à se faire vacciner. Quelle connerie ! Quelle catastroph­e pour les proches et ceux qui les ont contaminés. Il y a des places disponible­s tous les jours.

Prenez rendez-vous maintenant car demain, c’est déjà trop tard. »

«À40%,onades principes. À 11 %, on a des intérêts. Ainsi va la politique... »

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