Var-Matin (Brignoles / Le Luc / Saint-Maximin)
La SNCF traque les plantes envahissantes sur ses talus
Le réseau ferroviaire et des chercheurs expérimentent, près de Saint-Raphaël, une solution respectueuse de l’environnement pour maîtriser la végétation qui menace les rails.
Entre l’Estérel et la rade d’Agay, au détour d’un virage, un panneau siglé SNCF témoigne de l’expérimentation en cours. Au sol, le talus est jonché de petites pancartes délimitant quatre parcelles. Pourtant, il ne s’agit ni d’un potager, ni d’un champ de mauvaises herbes. Ici, la société ferroviaire collabore avec des chercheurs de l’Institut Méditerranéen de biologie et d’écologie et de l’université d’Aix-Marseille sur le programme REEVES (Recherche sur les espèces exotiques végétales envahissantes). Né à Reims fin 2018, le projet s’est exporté dans le Var et le Vaucluse en 2020. À Agay, l’envahisseur à maîtriser est le mimosa d’hiver. Comme la canne de Provence et l’ailanthe, cette plante est devenue un cauchemar pour la SNCF, tant en termes de sécurité du trafic ferroviaire que d’environnement. « Cela colonise nos talus et peut cacher des signaux, alerte Valentin Morin, porteur du projet. Des caténaires peuvent être touchées et il existe un risque de déstabilisation de certains talus.»
« La guerre des racines »
« Aujourd’hui il n’y a pas vraiment de technique fiable et durable, poursuit-il. L’éco-pâturage n’est pas adapté au site et le bâchage ne fonctionne pas systématiquement. De plus, il comporte un risque d’incendie. Quant aux produits phytosanitaires, ils ne sont pas efficaces et, de toute façon, notre objectif est d’en limiter l’utilisation. L’idée que nous privilégions ressemble à la renaturation qui se pratique déjà sur des sites pollués.»
Le principe expérimenté est celui de la concurrence végétative. « Il s’agit de planter des espèces locales pour empêcher le développement de plantes envahissantes, précise Sandrine Rabaseda, responsable du pôle environnement chez SNCF Paca. On parle aussi de guerre des racines ». Concrètement, une équipe de travaux met à nu le terrain et replante des espèces locales avec un développement moins important que le mimosa. «Ce dernier se dit : alors tiens il y a déjà quelqu’un en place donc je ne peux pas venir », simplifie Sandrine Rabaseda.
Rendez-vous en
Mètre dans une main et feuilles de relevé dans l’autre, des scientifiques analysent ensuite les données. Deux paramètres sont examinés de près : le couvert végétal (ou comment les nouvelles espèces se comportent dans l’aérien) et l’analyse du sol (pour vérifier les composés allopathiques). Mises en terre depuis janvier, les plantations sont scrutées de près deux fois par an sur trois années. « Il est beaucoup trop tôt pour savoir si le projet est prometteur, prévient Thierry Tatoni enseignant-chercheur à l’université d’Aix-Marseille. La bonne surprise sur l’ensemble des trois sites, c’est qu’il n’y a pas une forte réponse des invasifs ».
Si les résultats s’avèrent fructueux, ce procédé alternatif sera déployé à grande échelle. Un budget total de 2,5 millions d’euros sur trois ans est alloué à ces expériences sur toute la France (dont 500 000 euros pour les trois sites de Paca). La Région soutient le projet à hauteur de 60 000 euros. Fin de l’expérience : 2023.