Var-Matin (Brignoles / Le Luc / Saint-Maximin)
Cellule d’écoute après les violences dans la cité Berthe
La Seyne Après les tirs qui ont fait trois blessés dont un enfant, des groupes de débriefing sont ouverts aux habitants de la cité Berthe. Déjà menés en 2018, ils favorisent entraide et résilience
Que vit-on quand on entend des balles siffler sous ses fenêtres ? Quand des connaissances ou des proches sont touchés ? Quand l’affrontement inépuisable auquel se livrent des réseaux liés au trafic de drogue devient un risque pour soi et les siens ? À La Seyne, dans le quartier Berthe, ces questions rejaillissent, après les tirs de samedi 30 mai, qui ont fait trois blessés parmi un groupe qui se trouvaient devant l’immeuble l’Abricotier. Un enfant âgé de 8 ans qui faisait du vélo a été touché, par un éclat dans la nuque. Combien d’habitants de ce quartier sont-ils victimes, même de façon indirecte ? Face à une violence souvent ciblée, parfois aveugle, les dégâts collatéraux sont immenses. Cette semaine, l’Association vivre en famille (Avef) (1) a ouvert, à la demande de la mairie, un centre d’écoute psychologique « en faveur des personnes désirant être accompagnées suite au dramatique événement ». Intervenant au coeur du quartier Berthe depuis vingt ans, l’association y a gagné depuis longtemps confiance et respect.
« Séisme »
« Nous sommes allés vers », détaille Alexandrine Sanchez, psychologue clinicienne, utilisant une expression qui témoigne de sa démarche. « On a débriefé comme on a pu, avec un groupe de parole de rue »( lire ci-dessous). Une telle mission de débriefing avait déjà été menée en 2018, quand, au matin du 10 septembre, la cité se réveillait endeuillée, par la mort de deux jeunes tués par balles. « Nous pouvons comparer ce à quoi nous avons assisté à un séisme », ont décrit les deux intervenantes de l’Avef, dans une publication présentant leur méthode d’intervention. « Les langues se délient, ici on peut parler, pleurer, se livrer, être en colère », restituaient les deux femmes. Ce type de travail démarre en groupe, explique Manuel
Prieto, directeur de l’Avef, « pour repérer les gens qui ne vont pas bien ». Le groupe « permet de voir qu’on n’est pas seul à être impacté ». Dans cet espace de confidentialité, « la parole se délie et une relation de confiance s’installe ». Ce qui se pose, et s’impose, dépasse les corps blessés ou les murs criblés. C’est une onde de choc qui se propage. « L’impact va bien au-delà des quelques bâtiments autour des lieux concernés .»