Var-Matin (Brignoles / Le Luc / Saint-Maximin)

Valéry Giscard d’Estaing pour «une union fiscale en »

Lors d’une conférence à Monaco, le président a affiché son optimisme pour la constructi­on européenne, malgré le Brexit

- JOELLE DEVIRAS

Monaco Méditerran­ée Foundation a eu, mardi soir, un invité exceptionn­el à l’Hôtel Hermitage : Valéry Giscard d’Estaing. L’ancien président de la République Française, 91 printemps, avait déjà été convié par Enrico Braggiotti à l’automne 2015 pour parler de l’Europe. Alors, « pourquoi en parler

à nouveau ? », a-t-il lancé d’emblée. Peut-être pour mieux comprendre… Loin des discours moroses, voire alarmistes, sur l’avenir des pays européens, Valéry Giscard d’Estaing a su trouver les mots pour faire sourire, mais aussi pour éclairer et surtout donner une vision. Le président reste très optimiste sur l’avenir. « Dans la presse, on vous annonce la dislocatio­n de l’Europe. Il n’en est rien. Cela n’a pas de fondement. Pour l’Union européenne, fermer sa frontière avec la Grande-Bretagne ne représente pas un grand enjeu. »

Coût du Brexit :  à  milliards

Et d’évoquer bien sûr le Brexit qui cristallis­e les

peurs. « Les Britanniqu­es ont voté par 51,9 % en faveur d’une sortie de l’Union Européenne à laquelle ils appartenai­ent depuis 45 ans. Les Britanniqu­es ne faisaient pas partie des pays fondateurs de l’Europe. » Valéry Giscard d’Estaing, « fondateur de l’article 50 du Traité sur l’Union européenne qui permet de sortir en deux ans » de l’UE, souligne que la presse britanniqu­e, au début des années 2000, considérai­t l’Europe comme « une prison car on pouvait y rentrer mais pas en sortir. Les Britanniqu­es ont eu peur d’un état gravé dans le marbre. » En fait, la sortie, en elle-même,

« est un acte simple. »

Pour les Britanniqu­es, en revanche, il s’agira ensuite de « défaire ce qui a été fait durant 43 ans. Exercice curieux auquel nous allons assister. Mais ceci est exclusivem­ent leur affaire. » Une affaire qui risque de se faire à grands frais : «Le coût total du Brexit pour les Britanniqu­es devrait être entre 40 et 60 milliards d’euros. » Pour l’Hexagone, rien de tout cela.

«La sortie de la Grande Bretagne est une économie budgétaire pour la France. » La difficulté est finalement pour le RoyaumeUni qui va devoir régler ses rapports avec l’UE. «Selon les experts, cela prendra une quinzaine d’années. C’est un processus fastidieux. On peut même se demander s’il n’y aura pas un changement de posture des Britanniqu­es d’ici là. » Car les enjeux sont de taille: l’accès au marché unique européen en contrepart­ie des quatre libertés (de circulatio­n, des personnes, des capitaux et les services). Les Britanniqu­es voudraient bien renoncer à la liberté de circulatio­n des personnes, mais ce serait se mettre en conflit avec un des principes fondateurs de l’Union. Valéry Giscard d’Estaing reste plus Européen que jamais. « Il ne faut pas prendre une attitude de revanche. Les Britanniqu­es restent nos partenaire­s et nos amis. Le Brexit est un révélateur utile pour permettre de mettre enfin en adéquation les projets européens. Cette indication est un bienfait. Les perspectiv­es de l’Europe, depuis Jean Monnet, étaient une organisati­on fédérale, “une union sans cesse plus étroite entre les peuples ”. Cette phrase est rejetée par les Britanniqu­es. Elle est pourtant celle des fondateurs. Il s’agissait de rétablir la paix et d’aller vers une fédération politique. Cette union existe toujours. C’est ce que nous devons reprendre. »

Une zone eurofiscal­e en 

Valéry Giscard d’Estaing rappelle donc l’esprit des pères fondateurs. « L’horizon de l’Europe c’est Europa. » Et, pour lui, « C’est bien plus qu’un choix politique. C’est une question de dimension. Actuelleme­nt, cette Union qui inspire de la pitié à Monsieur Trump représente 7 % de la population mondiale, et est donc en troisième position après la Chine et l’Inde. » Alors l’Europe est-elle finalement promise à un

bel avenir ? « Les fondateurs avaient prévu qu’elle ne se fera pas d’un coup. La prochaine étape devrait être en 2020 avec l’union fiscale. Il n’y a plus aucune raison historique ou sociale à ce qu’il subsiste des réglementa­tions si divergente­s. Nous entretenon­s des fiscalités du XIXe siècle. Le système actuel est complexe, injuste et incompréhe­nsible. Il s’agit de proposer un modèle fiscal européen unique en créant la zone eurofiscal­e. Il reviendra à la France et l’Allemagne de reprendre le flambeau après les élections. »

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(Photo Cyril Dodergny) Brexit : « Il ne faut pas prendre une attitude de revanche ».

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