Terri Loewenthal
Cette Californienne compose d’étonnants paysages, ou plutôt les décompose puisqu’elle se sert de miroirs colorés pour en dissocier les couleurs et les perspectives dans un effet kaléidoscopique exaltant nos sens.
Les images de Terri Loewenthal déclinent en d’infinies variations les mêmes paysages désertiques ou semi-désertiques de l’Ouest des États-Unis, comme dans cette composition intitulée “Psychscape 394” et réalisée dans une réserve naturelle du Colorado en 2022. Plutôt qu’une reproduction descriptive du paysage, elle nous en livre une vision hautement subjective, évoquant comme chez les impressionnistes le souvenir diffus de l’expérience d’un lieu et d’une lumière. Les points de vue se superposent, et les couleurs se distillent dans un jaillissement sensoriel dépassant la simple perception rétinienne. Basée à Auckland, près de San Francisco, l’artiste – également musicienne – emploie pour cela un appareil moyen format équipé d’un objectif de sa fabrication. La décomposition du paysage se fait à la prise de vue grâce à l’utilisation de filtres dichroïques, aussi appelés “filtres interférentiels”. Leurs propriétés de transmission et de réflexion dépendent de la longueur d’onde : selon la couleur qu’ils reçoivent, ils deviennent tour à tour filtres ou bien miroirs… Par ce procédé, Terri Loewenthal entend s’émanciper d’une histoire de la photographie qui regorge d’hommes tentant de fournir des vues “définitives” de sites naturels, qu’ils s’approprient ainsi d’une certaine façon : “En tant que femme cherchant à réinventer le genre de la photographie de paysage, mon travail révèle l’erreur d’une vision objective unique et offre à sa place une subjectivité fidèle à la complexité vécue des interactions entre l’homme et la terre.”