Nice-Matin (Nice Littoral et Vallées)

BERTHE MORISOT,

LA PREMIÈRE FEMME IMPRESSION­NISTE GÉNIE MÉCONNU, BERTHE MORISOT EST UNE FIGURE MAJEURE DE L’IMPRESSION­NISME, PROCHE DES PLUS GRANDS ARTISTES DE SON TEMPS. POUR LUI RENDRE HOMMAGE, UNE EXPOSITION LUI EST CONSACRÉE JUSQU’À L’AUTOMNE AUX MUSÉE DES BEAUX-ARTS

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Elle a été la première femme impression­niste, et l’une des cofondatri­ces de ce mouvement d’avantgarde. Tout au long de sa carrière, Berthe Morisot (1841-1895) a suscité l’admiration et le respect de ses pairs, parmi lesquels Renoir, Monet, Degas ou Pissaro. Ce génie méconnu peine pourtant aujourd’hui à se faire un nom auprès du grand public. Afin de lui rendre hommage, le musée des Beaux-arts Jules Chéret lui consacre une exposition de premier plan, en partenaria­t avec le musée d’orsay (dans le cadre de l’opération « Les 150 ans de l’impression­nisme ») et le Palazzo Ducale de Gênes.

ESCAPADES NIÇOISES

« Berthe Morisot à Nice, escales impression­nistes » évoque les deux séjours de la peintre sur la Riviera lors des hivers 1881-1882 et 1888-1889, et dévoile pour la première fois une soixantain­e d’oeuvres créées dans la région. C’est en novembre 1881 que l’artiste et son mari Eugène Manet (1833-1892) -frère cadet d’edouard, dont elle est la muse- quittent Paris pour un voyage à Nice. Poussés par le désir de Berthe de découvrir l’italie, il s’agit aussi pour les parents de la petite Julie de faire profiter leur fille âgée de seulement trois ans du climat clément de la Riviera en hiver. Débutant leur séjour dans l’un des hôtels les plus renommés de la ville, l’hôtel d’angleterre, ils le poursuiven­t à l’hôtel Richemont, moins luxueux mais plus au calme. Berthe aime se balader sur les chemins ombragés de la colline du Château d’où elle admire le panorama enchanteur sur la ville et la baie des Anges. Le port et la plage de Nice sont les sujets de prédilecti­on de la jeune impression­niste, attirée par l’eau et ses reflets insaisissa­bles. Berthe fraye parmi les pêcheurs. Elle est la première artiste à poser son chevalet sur les planches vacillante­s d’un pointu, ou encore, sur les galets, préférant aux chaises alors vertes de la Promenade des Anglais la proximité avec le rivage. Son tableau majeur « La Plage de Nice » révèle ainsi un point de vue original sur les premiers bains de mer et le Casino de la Jetée

Promenade encore en constructi­on. Berthe Morisot peint aussi les orangers de la villa Arnulphy, dans le quartier Saint-sylvestre. La peintre ose des partis pris inédits, privilégia­nt les cadrages serrés. Ses coups de pinceaux donnent vie à un style empreint de douceur et de féminité, porté par des formes floues et des couleurs claires desquelles émanent une insaisissa­ble sérénité. Conquis par son art, Stéphane Mallarmé, l’un de ses proches amis, lui disait ainsi qu’il venait « se purifier la vue devant ses oeuvres ».

JULIE, SA FILLE CHÉRIE

Lors de son deuxième voyage à Nice, en 1888, Berthe s’installe en famille à la villa Ratti sur la colline de Cimiez, où elle reçoit les visites régulières de Renoir. Sa fille Julie, l’amour de sa vie, reste son sujet de prédilecti­on. L’enfant a dix ans et s’initie auprès de sa mère à la peinture, imitant les compositio­ns de Berthe. La peintre impression­niste profite elle de son nouveau séjour niçois pour peindre et dessiner des autoportra­its, des jeunes filles paisibles, explorer le thème du Carnaval de Nice… Surtout, elle installe des chevalets partout dans le jardin de six hectares de la villa Ratti, transposan­t sur la toile ce luxuriant écrin végétal aux plantes exotiques rares. Les formes de cette période sont toujours diffuses mais une vie les anime et rend sa peinture attrayante et bouleversa­nte. Son art dévoile à son entourage ce qu’en femme introverti­e son coeur n’exprime qu’avec pudeur et retenue. Rarement satisfaite du résultat de ses oeuvres, Berthe Morisot meurt prématurém­ent à l’âge de 54 ans,

nd deux ans seulement après son mari Eugène.

UNE PEINTRE PRISÉE AUX ENCHÈRES

Au-delà des chefs-d’oeuvre de Berthe Morisot, l’exposition dévoile également des peintures d’auguste Renoir et de Claude Monet notamment « Les Villas à Bordighera » (1884), cadeau du peintre à Berthe. Des peintures de femmes artistes de son temps sont également conviées : Eva Gonzalès, Mary Cassatt, Louise Breslau,

Marie Bashkirtse­ff… pour un rapprochem­ent lumineux entre leurs oeuvres niçoises et celles de la première dame impression­niste.

Aux enchères, si elle est loin des records enregistré­s par ses confrères impression­nistes, Berthe Morisot n’en est pas moins une artiste de renom dont les oeuvres demeurent prisées des collection­neurs. En avril dernier, sa « Petite fille aux cheveux blonds » (1883) a ainsi décroché la somme de 378 000 euros chez Christie’s à Paris. Son record revient au tableau « Après le déjeuner » (1881), adjugé pour 7,2 millions d’euros en 2013 chez Christie’s toujours. Un joli montant pour cette artiste dont l’acte de décès indiquait la mention « sans profession ».

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Berthe Morisot, La Plage de Nice, 1882 - Huile sur toile, 46,5 x 56 cm - Collection particuliè­re © Sotheby’s
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Berthe Morisot © DR
 ?? Sous l’oranger ?? Berthe Morisot, (détail), 1889, huile sur toile, 54,6 x 65,7 cm, Kansas City, Nelson-atkins Museum of Art © Image courtesy Nelson-atkins Media Services, Gabe Hopkins
Sous l’oranger Berthe Morisot, (détail), 1889, huile sur toile, 54,6 x 65,7 cm, Kansas City, Nelson-atkins Museum of Art © Image courtesy Nelson-atkins Media Services, Gabe Hopkins
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> Berthe Morisot, La cueillette des oranges à Cimiez, 1889 Pastel sur papier, 60,8 x 45,9 cm - Grasse, Musée d’art et d’histoire de Provence © Ville de Grasse
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Berthe Morisot,
1882 - Huile sur papier marouflé sur toile
53 x 43 cm - Paris, Musée Marmottan-monet © Tous droits réservés
Le Port de Nice, < Berthe Morisot, 1882 - Huile sur papier marouflé sur toile 53 x 43 cm - Paris, Musée Marmottan-monet © Tous droits réservés

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