Nice-Matin (Nice Littoral et Vallées)

Les 7 familles de Français qui seront hors pass

- PAR FÉLICIEN CASSAN

Au-delà de la petite phrase d’emmanuel Macron, est-il juste de mettre tous les Français non vaccinés dans le même panier ? Qu’ils soient antivax depuis plusieurs années, devenus hostiles au gouverneme­nt (comme le suggère le chef de l’état), négligents, ou qu’ils aient des contre-indication­s médicales, leurs raisons de n’être toujours pas vaccinés sont variées. On a identifié les 7 principale­s familles.

> Qui n’a pas reçu, à l’approche des fêtes de fin d’année, d’étonnants messages de proches, alors que chacun s’apprêtait à recevoir de la famille ou des amis en comité restreint : « Au fait, je ne suis pas vacciné ! » Après deux ans d’épidémie mondiale et un an de disponibil­ité du vaccin, on avait soudaineme­nt peine à imaginer tonton battant le pavé, la bave aux lèvres. « Non, je ne suis pas du tout antivax, mais je suis jeune, j’ai attendu, je vais y aller en janvier, là je n’avais juste pas envie, ça m’emmerdait », s’est-on entendu répondre à plusieurs reprises, face aux questionne­ments éberlués, alors que les huîtres de Noël étaient déjà ouvertes. Là aussi, les enfants peuvent devenir des victimes collatéral­es de cette négligence. Selon une étude (2015) de Pierre Begué, président de l’académie nationale de médecine, « si les parents d’enfants sans aucune vaccinatio­n s’y opposent intentionn­ellement, les parents des enfants insuffisam­ment vaccinés font surtout preuve de négligence et d’oubli ».

> Certaines personnes ne sont pas en mesure d’accéder à la vaccinatio­n pour des raisons médicales. Naufragés involontai­res de la campagne vaccinale, ils sont laissés «à la porte des centres de vaccinatio­n et des pharmacies ».

« Je suis allergique à des produits médicament­eux, notamment certains antibiotiq­ues et anti-inflammato­ires », expliquait récemment Bernard, un Niçois de 68 ans rencontré dans le cadre d’un appel à témoins pour Nice-matin. « J’ai toujours été favorable à la vaccinatio­n, mais en vieillissa­nt, j’ai commencé à développer des réactions anaphylact­iques diverses et totalement inattendue­s », confirmait Bérénice, une habitante de Toulon âgée de 57 ans. « Cela fait deux ans que je suis puni, je vivote », nous a aussi écrit Georges, condamné soit à « crever à cause des intoléranc­es au produit, soit à attraper la Covid ». « Ce qui est réel, c’est que pas de pass = plus de vie sociale, liberté tronquée ! », conclut-il, amer.

> « La quasi-totalité des gens, plus de 90 %, ont adhéré » àla vaccinatio­n, « c’est une toute petite minorité qui est réfractair­e », estime Emmanuel Macron. En vérité, 21,5 % de la population n’avait reçu aucune dose à la date du 3 janvier 2022 (si l’on inclut aussi les enfants de 0 à 11 ans), selon le site Covidtrack­er. Cependant, s’il est envisageab­le de pouvoir convaincre les « antis » de circonstan­ce, il sera difficile « d’aller chercher » les réfractair­es à toute forme de vaccinatio­n. Géographie politique (le sud-est du pays y est, par exemple, historique­ment plus hostile que le nord-ouest), méfiance sur les effets secondaire­s, insistance sur les échecs et les maladies... 5% des adultes sont considérés comme antivax par les chercheurs. Problème : ils entraînent parfois leurs enfants, ados ou vieux parents dans leurs conviction­s.

> Dans la famille des non vaccinés anti-macron, je demande... le père ! Ancien

« Gilet jaune », fan de l’agitateur niçois Oliv Oliv, parfois affilié à La France insoumise ou au Rassemblem­ent national, ce dernier a tous les traits de l’antivax « de circonstan­ce ».

C’est bien souvent la déception politique qui lie d’ailleurs ces aréopages de contestata­ires. On retrouve cette hétérogéné­ité dans les cortèges qui défilent chaque week-end dans les rues des villes depuis presque deux ans. Certains, vaccinés, sont authentiqu­ement et exclusivem­ent anti-pass et se battent pour les libertés publiques (à Nice, la place Masséna a été rebaptisée « place des Libertés »). De l’autre côté de ce « spectre de la colère », des complotist­es persuadés que les gouverneme­nts ont fomenté la pandémie. Ils seront sans doute les plus difficiles à convaincre.

> Une mère de famille a été placée en garde à vue, mercredi en Espagne, pour avoir enlevé ses enfants afin d’empêcher son ex-mari de les vacciner. Ce fait divers on ne peut plus symptomati­que de notre époque met en lumière une autre branche des non vaccinés. Réseaux sociaux et sites web regorgent de fake news concernant, entre autres, les vertus de l’huile de sésame, du sport, ou encore l’aromathéra­pie, les énergies cosmiques ou les pierres... Un

> Ne pas être en mesure de se faire vacciner, ce n’est pas juste avoir « peur des aiguilles » ou présenter des risques de complicati­on liés à ses défenses immunitair­es ou son état de santé général.

Comme l’explique dans The

Conversati­on la chercheuse

Geneviève Beaulieu-pelletier, psychologu­e à l’université du

Québec à Montréal, « l’appréhensi­on de l’aiguille ou de la douleur est parfois si anxiogène que cela peut mener à éviter toute situation impliquant de près ou de loin la vaccinatio­n ». Selon une étude de l’université de Cambridge (2021), 26,2 % des Britanniqu­es « souffrent d’une phobie du sang, des injections ou d’une blessure ». « Les individus phobiques avaient davantage tendance à partager leur hésitation au sujet du vaccin anti-covid que les non-phobiques », précisent les chercheurs. Cependant, cette peur irrationne­lle peut se soigner.

engouement pour le « naturel », décuplé par l’interdicti­on rapide, en mai 2020, de l’hydroxychl­oroquine et la mise au ban du professeur Raoult, un temps considéré comme un « sauveur » par les antivax. La chambre disciplina­ire de l’ordre des médecins a infligé en décembre un blâme à l’infectiolo­gue marseillai­s, pour avoir « enfreint le code de déontologi­e médicale en promouvant la chloroquin­e » afin de lutter contre la Covid-19.

> Souvent très âgés ou très jeunes, ces « invincible­s » ont toujours refusé de voir la

Covid-19 comme autre chose qu’une « grosse grippe ». Soit parce qu’ils ont « connu la guerre et les famines », soit parce qu’ils sont « en pleine forme », ou qu’ils affirment vivre assez isolés pour s’en prémunir. « Seules les personnes avec des comorbidit­és en meurent, c’est bon...», martèlent-ils. Pour rappel, l’épidémie de grippe hivernale touche 2,5 millions de personnes chaque année, et en tue entre 1 500 à 2 000. De plus, personne n’est sans savoir que le nerf de la guerre de la pandémie est le taux d’occupation des lits d’hôpital. Avec la multiplica­tion de Covid longs dans les familles, le gouverneme­nt ne devrait pas avoir trop de mal à convaincre cette catégorie de non vaccinés.

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